Le GNV, gaz naturel pour véhicules est-il un bon carburant automobile ?
Le vent en poupeOn parle beaucoup du gaz naturel comme carburant automobile. C'est normal. Avec le prix du pétrole qui fait du yoyo, et les discours alarmistes sur le réchauffement de la planète qui se multiplient, tout carburant non issu du pétrole éveille l'intérêt. Et si en plus ce carburant est annoncé comme moins polluant que le pétrole, c'est fabuleux ! Du moins potentiellement, car la réalité est un peu moins rose, et un peu moins verte, que ce que certains promoteurs du gaz naturel voudraient faire croire. C'est ce que cet article tentera de démontrer.
Le gaz naturel jouit cependant d'un atout formidable, c'est qu'il est disponible partout en France. A domicile même, pour plusieurs millions de français. Car le GNV, Gaz Naturel pour Véhicules (on dit aussi CNG, pour Compressed Natural Gas), c'est le gaz distribué en France par GDF qui sert aux usages domestiques. C'est donc un produit que les français connaissent, même si ce n'est pas en tant que carburant. Encore que sur ce point, les choses changent : il y a en France plus de 7000 véhicules qui roulent au GNV. Dont plus de 1600 bus, mais sans que cela veuille dire que le GNV ne convienne pas à la performance, puisque le carrossier suisse Rinspeed avait présenté un concept-car sur une base Porsche Turbo, qui était alimenté au GNV. C'était le Rinspeed Bedouin, en 2003 (photo ci-dessus), et précisons de suite que son développement avait été payé par la compagnie locale du gaz.
Les premiers promoteurs du GNV sont en effet très logiquement les gaziers, et quoi de plus logique que de vouloir se diversifier à l'heure où de plus en plus de gens sont passé aux cuisinières électriques. Les architectes le savent bien : comme il y a 100 ans, on construit à nouveau des immeubles sans réseau de distribution de gaz. Cela se constate dans toute l'Europe, le nombre de particuliers abonnés au gaz s'amenuise régulièrement. Alors pour les remplacer, les gaziers ont pensé aux automobilistes... D'autant plus que les constructeurs automobiles seraient eux aussi plutôt d'accord pour soutenir le GNV, mais c'est là de même pour une question d'argent.
Le raisonnement est que tous les constructeurs voudraient produire des voitures
vertes. A piles à combustible, ou bien hybrides essence-électrique, mais les coûts de développement sont énormes, alors que la conversion d'une voiture à essence vers l'usage du GNV est infiniment plus facile et rapide...
2 méthodes existent pour convertir une voiture au GNV. Partant du postulat que toutes les autos acceptant le GNV sont bi-carburation, la manière simple est de laisser la voiture optimisée pour l'essence. C'est le cas de la Golf Variant (photo ci-contre de ses réservoirs) dont le moteur délivre une puissance de 75 kW avec le GNV, et de 85 kW avec de l'essence. La Citroën C3 GNV (photo plus bas), qui sera commercialisée en 2005 est conçue sur ce principe. Son moteur donne 48 kW avec du GNV, 55 kW avec de l'essence.
La seconde manière de concevoir une auto au GNV, c'est de l'optimiser pour ce carburant, et ce qu'a choisi Opel pour son Zafira (éclaté, ci-contre), dont le moteur fournit une puissance de 71 kW lorsqu'il est alimenté au GNV, mais de seulement 55 kW quand il tourne à l'essence. Et si on souhaite vraiment une voiture optimisée pour le GNV, on peut choisir une auto monovalente, comme la Honda Civic GX (photo plus bas) qui n'a qu'un réservoir de GNV, et ne peut fonctionner à l'essence. Mais cette voiture n'est pas disponible en France, et aux USA Honda ne la propose même pas aux particuliers. Cependant, avec un moteur optimisé à 100 % pour le GNV, sa pollution est vraiment minimale, puisqu'elle est la moins polluante de toutes les autos disponibles sur le marché américain.
Ce qui amène à la question principale, celle de la mesure de la réduction de pollution offerte par le gaz naturel. On dit souvent que le GNV pollue moins que l'essence, puisqu'il a une faible teneur en carbone, c'est vrai, mais si c'est le but autant passer à l'hydrogène pour qu'il n'y ait plus du tout de carbone... A l'échappement, par rapport à l'essence, cette différence aboutit à une réduction des gazs à effets de serre (CO2) de 15 à 25 %. C'est bien, mais si l'on considère que le GNV est tout autant une ressource fossile que le pétrole, ce n'est pas suffisant pour convaincre un écologiste de la supériorité du GNV. L'avantage principal est ailleurs, il est dans la combustion plus propre du GNV, laquelle dégage moins d'oxydes d'azote, moins de particules, et moins de composés organiques volatils (C.O.V.) que l'essence ou le gazole. Mais il y a un
mais.
Ce
mais n'est pas dans les futurs filtres à l'échappement, comme les filtres à NOx, qui viendront réduire la supériorité du GNV à un quasi-néant, mais dans le GNV lui-même. Le gaz naturel est comme son nom l'indique naturel, il faut comprendre brut, et de qualité variable. Pour donner une illustration, le constructeur Volvo, qui travaille depuis longtemps sur le GNV, avait organisé un jour une séance d'essais avec des voitures au GNV, au Danemark. Les ingénieurs n'y comprenaient rien, les voitures n'avaient pas du tout les mêmes performances que lorsqu'elles étaient en Suède. L'explication était pourtant simple, le gaz naturel, d'un pays à l'autre, n'est pas le même.
C'est normal, puisqu'au contraire du pétrole qui subit un traitement très lourd pour être transformé en essence, le gaz naturel n'est modifié en rien. On a l'habitude de croire que le gaz naturel est essentiellement composé de méthane, c'est vrai, mais il faut aller plus loin. En France en 2004, GDF distribue du gaz naturel en provenance des gisements de Groningue (Pays-Bas, gaz composé de méthane à 81,3 %), de Hassi R'Mel (Algérie, gaz composé de méthane à 83,7 %), d'Ourengoï (Russie, gaz composé de méthane à 85,3 %), et aussi de Norvège et du Nigeria. Ce qui fait beaucoup de comparaisons à faire, car si les proportions de méthane varient, les autres gazs mélangés au méthane pour faire le gaz naturel sont eux aussi variables. 14 % du gaz naturel de Groningue est ainsi de l'azote, et 6,8 % du gaz naturel de Hassi R'Mel est de l'éthane.
On donnera tout en bas quelques chiffres pour les chimistes, mais ce qu'il faut comprendre est que le gaz naturel connait des variations dans sa composition qui peuvent altérer sa qualité dans une amplitude de 30 %. Rapporté à l'essence, c'est un peu comme si le SP95 pouvait avoir un indice d'octane variant de 81 à 109... Quand on pense qu'il y a des automobilistes qui se plaignent des différences entre le carburant de supermarché et celui de marque, que diraient-ils du GNV ? Et on ne peut pas se plaindre, car ce sera pire demain, avec l'ouverture des marchés de l'énergie. Déja en Europe, on estime l'amplitude de la variation de qualité des différents gazs naturels à plus de 50 %. Et en 2007, une entreprise française pourra aller acheter du gaz au puits de Kirkouk (Irak), et le revendre en France comme gaz naturel, ce qu'il est, même s'il ne contient que 56,9 % de méthane.
Alors, en attendant des normes de qualité beaucoup plus strictes que celles aujourd'hui en vigueur, tous les chiffres avantageux sur la réduction de pollution apportée par le GNV sont faux. Parce que si la qualité du carburant varie, les résultats de son usage dans un moteur thermique varieront aussi, et dans des proportions plus grandes encore. Puissance obtenue, consommations, émissions de gazs à effet de serre, émissions de polluants, toxicité de ces polluants, rien n'est assuré. Sur un autobus, avec un gros moteur qui tourne lentement, les différences sont peu sensibles, mais sur une voiture à hautes performances, comme la Rinspeed Bedouin, même avec une gestion moteur sophistiquée, le conducteur sentira de suite que ce qu'il a sous le pied dépend de sa station de ravitaillement.
Il y aurait un moyen de contourner ce problème, c'est de ravitailler toujours au même endroit. Car en France, pour le moment avec GDF fournisseur unique, ce n'est qu'en changeant de région qu'on change de gaz. On sait par exemple que le gaz vendu dans le Nord de la France est exclusivement en provenance des Pays-Bas, et qu'il n'est pas de très bonne qualité, alors que c'est meilleur au Sud, avec du gaz russe, algérien ou d'ailleurs... On peut donc avoir un carburant stable en ravitaillant chez soi, ce sera possible avec
Phill, un petit compresseur domestique mis au point par
Plug Power, un futur acteur majeur de la société de l'hydrogène, et qui en la préparant, s'occupe de gaz naturel. GDF et Honda ont signé des accords de distribution pour ce petit compresseur, qui permettra au particulier de faire son plein dans son garage. Il suffit de brancher le tuyau le soir, et c'est automatique. Sur la C3, un plein permettant de faire plus de 200 km s'effectue en 9 heures. Et si c'est lent, c'est la faute à la faible pression du réseau.
Il y aurait ensuite une autre solution, ce serait de faire à partir du gaz naturel, un produit qui ne le serait plus, mais qui par contre répondrait à des critères qualitatifs extremement stricts. Shell travaille sur ce sujet depuis plusieurs années, et le pétrolier a développé un carburant liquide, performant et peu polluant, à partir de gaz naturel. Ce produit a été testé avec succès par
Volkswagen puis
Toyota, mais sa mise sur le marché à grande échelle nécessiterait des investissements colossaux pour ériger les usines de transformation. Et si on revient à parler gros sous, on questionne vite l'intérêt de lourds investissements dans l'exploitation de ressources fossiles, qui ne généreraient une réduction des émissions de gazs à effet de serre que de 20 %...
C'est à peu près ce même raisonnement que s'est tenu BMW. Le constructeur de Munich avait été le premier européen à proposer un modèle bicarburation essence/GNV, c'était la 316 g en 1995 (photo ci-dessus), elle n'est plus disponible aujourd'hui. BMW a stoppé la production, la commercialisation et le développement de voitures au GNV. Parec que ce n'est pas intelligent. Tant qu'à investir, autant le faire dans un carburant qui ne générerait aucun gaz à effet de serre, et qui pourrait être produit de manière renouvelable.
Ce carburant existe, BMW l'a trouvé, c'est l'hydrogène.
Le gaz naturel distribué en France par l'entreprise GDF possède les tolérances suivantes.
Pouvoir calorifique supérieur : 9,5 à 12,8 KWh/m
3Indice de Wobbe : 11,8 à 15,7 KWh/m
3Les différences se constatent essentiellement d'une région à une autre, mais la qualité peut aussi varier dans l'hypothèse d'un pic de consommation. Le gaz russe arrive par pipe avec un débit fixe et non modifiable. Ainsi, dans l'hypothèse de besoins plus importants que prévu dans la région habituée au gaz russe, il est nécessaire de changer de source d'approvisionnement, ce qui peut conduire à passer d'un coup au gaz algérien...
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