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Naufrage Erika, la vérité toujours cachée

Ven 08/12/2006   —   7 ans après la catastrophe, des journalistes de France 3 ont réalisé un reportage sur la double affaire de l'Erika, celle de l'accident maritime, et celle du mystère de son contenu, largement ignorée.
Un accident est presque normal. Il y en a toujours eu, on les comptabilise par des statistiques, et les assureurs savent bien que le risque zéro n'existe pas. S'il n'avait eu des conséquences aussi dramatiques qu'une marée noire, le naufrage de l'Erika n'aurait été qu'un fait divers. Et si le procès qui doit s'ouvrir en février (calendrier) ne juge que l'accident maritime, il ne vaudra pas plus qu'un accident entre automobilistes. Le procès à faire, et qui à ce jour n'est pas prévu, est celui du pétrole. Il intéresserait pourtant tous les automobilistes... Plus qu'un navire, l'Erika était une boite à anomalies, et il faut être bien naïf pour croire qu'il serait un cas unique. Peu après le naufrage, les services de secours qui tentent de pomper les nappes dans la mer ont toutes les peines du monde, car leurs pompes, pourtant prévues pour l'hydrocarbure qu'était déclaré contenir l'Erika, s'obstruent. L'hydrocarbure s'échappant du navire est plus épais, plus lourd, que ce à quoi on s'attendait. Une analyse d'Analytika viendra confirmer cela, mais on ne lui accordera pas de valeur légale. Ce qui par contre a une valeur légale, est que la quantité d'hydrocarbures chargée sur le navire, était supérieure à celle recommandée pour ce batiment. Avec le fait troublant que le temps de chargement fut 40 % plus long que prévu. Intérrogé sur ce point précis, Pierre Guyonnet, porte-parole de Total, l'affrêteur du navire, indique que « cela n'a aucune importance ».

Ce témoignane a été recueilli par Willy Colin et Antoine Placier, les 2 journalistes de France 3 qui ont réalisé un étonnant reportage pour l'émission Les clés de l'info. Cette émission dure une heure, elle est visible pendant quelques jours sur Internet en cliquant ici. On y apprend aussi que la quantité d'hydrocarbures chargée ne correspondait pas à ce que le client (un pétrolier italien) avait commandé. Il y en avait plus, mais le monsieur de chez Total dit que ce n'est « pas grave ». Il y a d'autres anomalies, et pour éclaircir la situation, il aurait fallu faire une expertise officielle de l'hydrocarbure pompé sur le navire dans les jours suivant le naufrage. Mais cette expertise a été empêchée par Total...

Ce qu'on soupçonne l'Erika d'avoir contenu était les déchets d'une raffinerie. Les résidus de crackage, le gras du gras, les boues de fonds de cuve, la partie tellement lourde du pétrole qu'il serait trop cher d'en faire quoi que ce soit. Ce sont des déchets dangereux, classés, dont l'exportation hors d'Europe est interdite, dont le traitement de fin de vie est cher, et fait l'objet de nombreux contrôles. Mais la production en est libre, et n'est soumise à aucun contrôle. Les raffineurs français sont simplement astreints à déclarer les quantités qu'ils retraitent en respectant les normes. C'est un système très fiable, contrôlé par la DRIRE, et il n'y a jamais d'erreur entre les quantités de déchets de raffinerie déclarées retraitées, et les quantités effectivement retraitées. Alors tout va bien, et c'est toujours mieux que les raffineries africaines qui ne retraitent rien. Les affaires peuvent continuer : 2 jours après la catastrophe de l'Erika, Total affrêtait un autre navire pour livrer le client italien qui attendait sa commande. Il fut bien chargé cette fois, on n'y mit que la quantité que le client avait demandé.

Vivement l'hydrogène.

La photo qui illustre cette page provient de l'excellent site http://www.mareenoire.info/.


Rubrique(s) et mot(s)-clé : hors-constructeur ; ecologie