Alain Juppé, l'espoir d'une avancée
Lun 21/05/2007 — Le nouveau gouvernement a une caractéristique inédite. Il fusionne les ministères de l'Equipement, des Transports, de la Mer et de l'Ecologie dans le Développement et l'Aménagement Durable. M.Juppé sera partout.
Il va y avoir des antagonismes, et c'est peut-être dans l'industrie automobile qu'on verra le plus vif. Car il y a justement un problème sur le bureau. La Commission de Bruxelles a proposé en février dernier de réduire les émissions de CO2 des voitures à 130 g/km d'ici 2012 (120 avec des aménagements complémentaires), et l'Association des Constructeurs Européens (ACEA) a par 2 fois exprimé que cet objectif ne pouvait pas être atteint dans le délai imparti. Joker pour Alain Juppé, ce problème n'est pas sur son bureau, mais sur celui de la Commission de Bruxelles, où la question oppose de manière frontale les commissaires Verheugen (DG Entreprises) et Dimas (DG Environnement). Mais quand l'un et l'autre cherchent des appuis dans les états-membres pour soutenir leurs projets, M. Juppé devra un jour prochain prendre parti pour l'un ou l'autre.
La tâche sera d'autant plus ardue qu'en Allemagne, ce n'est pas moins qu'Angela Merkel qui a pris le parti de l'industrie. C'est dire que si M. Juppé prend position pour l'écologie comme nous le souhaitons vivement, cela peut aboutir à stresser les relations franco-allemandes ! La décision ne pourra pas se prendre à la légère... Mais au moins, pour la première fois dans l'histoire de France, l'écologie est confiée à un homme politique de premier plan. Alain Juppé a l'envergure d'un chef d'état (même si hélas pour lui, il ne le sera probablement jamais), et cela change des ministres potiches qu'on a connu à ce poste. Tandis que s'il arrivait qu'on y trouve une personne compétente, comme le fut par exemple Serge Lepeltier, il ne restait pas longtemps. Parce qu'il n'est pas un second couteau, et qu'il est numéro deux du gouvernement, la nomination d'Alain Juppé est un immense espoir.
Mais dans le même temps, c'est une énorme interrogation, car nous ignorons tout de ses convictions écologiques. On le dit nourri à l'exemple d'Al Gore, mais est-ce suffisant ? On le sait méthodique et réformiste, réorganiser des ministères est à sa portée. Il connait les affaires, et c'est tant mieux. M. Juppé doit parvenir à ce que les fonctionnaires des Ponts et Chaussées travaillent en collaboration avec ceux de l'Ademe. Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) donne déjà une idée de ce que pourrait être cette entente à venir. Mais si cette restructuration des services de l'état impressionne par elle-même, il faudra pourtant faire bien plus pour combattre le réchauffement climatique. Alors commencer par l'aviation serait opportun. Instaurer un tarif minima de 100 € pour les billets, moduler les taxes d'aéroports en fonction des destinations (plus c'est proche, plus c'est cher), serait le début. Parce qu'il est scandaleux de prendre l'avion pour faire Paris/Londres, Paris/Genève ou Paris/Bruxelles quand il y a des trains fréquents et rapides sur ces parcours. Parce qu'Alain Juppé et le président qui l'a nommé ont tout à gagner à réussir le pari de l'environnement, nous sommes raisonnablement optimistes.
Laurent J. Masson
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