Il faut contrer les constructeurs sur le CO2
Dim 10/06/2007 — En Amérique comme en Europe, le problème est le même : réduire les émissions de CO2 des voitures. Les solutions sont aussi identiques, idem les oppositions, mais c'est le moment d'avoir de l'imagination.
On a d'un côté les gentils. De ce côté-ci de l'Atlantique, c'est la Commission de Bruxelles, qui a proposée de fixer une limite moyenne de rejets de CO2 par voiture de 130 g/km d'ici 5 ans. Aux Etats-Unis, ce rôle est détenu par quelques sénateurs qui ont lancé une proposition pour réduire la consommation moyenne des autos par marque (CAFE). Du côté des méchants, ce sont exactement les mêmes de part et d'autre de l'océan, les mêmes grands groupes internationaux, accompagnés des acteurs locaux pour chaque continent. Ils sont contre toute législation qui viendrait limiter la consommation, ou les rejets de CO2 de leurs produits. Leur lobbying est particulièrement fort aux USA du fait de l'urgence, puisque le projet du sénat est à son ordre du jour ce mois-ci, et il accélère aussi en Europe.
L'association des constructeurs européens (ACEA) vient en effet de publier un nouveau communiqué, pour réitérer qu'atteindre l'objectif d'une moyenne de 130 g/km de CO2 en 2012 n'est pas faisable. Elle ajoute que l'automobile est une industrie lourde, où les changements ne peuvent se faire que très graduellement. Selon l'ACEA, aucune nouvelle réglementation ne doit prendre effet avant 2015 au plus tôt ! Ce qui en dit long sur le respect des engagements passés au sein de l'ACEA, parce que si les constructeurs respectaient leur engagement d'être à 140 g/km en 2008, ce ne serait plus un problème de descendre à 130 g/km en 2012. L'objectif initial, vieux de 11 ans, était de 120 g/km, et aucun constructeur ne peut dire qu'il ne le connaissait pas.
Face à cette mauvaise foi, le projet de réduction des émissions de CO2 des voitures particulières serait dans une impasse. Mais, on doit pouvoir l'en sortir avec une idée originale, par exemple un régime d'exemption temporaire. Par définition, les exemptions sont critiquables, mais il en existe déjà des milliers. L'une est au niveau des procédures d'homologation. Un petit constructeur comme Caterham bénéficie de procédures simplifiées, parce qu'il vend moins de 1000 voitures par an. Pour le CO2, l'objectif serait de s'en tenir au vieil objectif de 120 g/km de CO2 d'ici 2012, mais notre suggestion serait de permettre aux constructeurs d'acheter un droit d'exemption, pour un modèle bien particulier, qui leur serait interdit de vendre à plus de 1000 unités dans l'année, et dont les émissions ne rentreraient pas dans le calcul qui doit aboutir à la moyenne de 120 g/km.
Cela devrait permettre à Mercedes d'afficher une moyenne assez acceptable, puisque les modèles qu'il vend le plus sont des 4 cylindres diesel, tout en le laissant libre, temporairement, de vendre des petites quantités de super berlines à moteur V12. Celles qui viennent ajourd'hui lui casser sa moyenne d'émissions par voiture. Cette idée peut probablement concilier les intérêts des 2 parties. Mais il y aurait une très difficile négociation pour définir : le nombre d'années pendant lequel ce régime d'exemption pourrait durer ; le nombre maximal de voitures qu'il serait possible de vendre pour en bénéficier ; le nombre maximal d'exemptions par constructeur ; le montant croissant du droit d'exemption dont les constructeurs devraient s'acquitter.
Laurent J. Masson
Nos illustrations, la Volkswagen Lupo 3 litres, 81 g/km de CO2, une auto lancée en 1999.
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