CO2 : les constructeurs fautifs
Mer 26/12/2007 — Les mesures proposées par Bruxelles la semaine dernière pour limiter les émissions de CO2 des voitures font l'unanimité. Contre elles, mais seulement chez les constructeurs.
On savait que la commission allait frapper fort, c'est ce qu'elle a fait, et elle a bien fait. Sa proposition fait mal aux constructeurs, mais ils l'ont pleinement mérité puisqu'ils l'ont pas respecté leur engagement. Le but de la Commission est de réduire les émissions de CO2 de nos voitures, personne ne peut dire que ce soit une mauvaise idée. On mesure les émissions à l'échappement, et la valeur obtenue, exprimée en g/km, est l'objet d'une médiatisation croissante. Pour beaucoup de gens, elle est même devenue un critère de sélection pour choisir sa prochaine voiture, et le bonus-malus va accentuer cela, en liant les émissions au portefeuille. Pour les constructeurs maintenant, c'est différent, on calcule les émissions moyennes, en se basant sur toutes les voitures qu'ils vendent dans une année.
C'est ainsi qu'on peut établir une hiérarchie entre les constructeurs, entre ceux qui fabriquent les voitures qui rejettent le moins de CO2, et ceux qui font celles qui en rejettent le plus. Le terme de hiérarchie est très approprié, puisqu'on trouve en bas Fiat, qui fait des petites voitures, et en haut Mercedes, qui en fait des grosses. On peut aussi calculer une moyenne d'émissions globales, pour toute l'industrie, c'est ce qu'avait fait l'ACEA (association des constructeurs automobile européens). L'ACEA est le bras armé des constructeurs automobiles européens à Bruxelles, une structure officielle de lobbying, elle s'était engagé par un accord volontaire en 1998, à parvenir à une moyenne d'émissions de CO2 de 140 g/km en 2008. Cet accord volontaire était en ligne sur le site de l'ACEA, mais il n'est bizarrement plus accessible. Nous l'avions pourtant reconsulté au printemps 2007, il était dans nos favoris. Peut-être qu'un pirate onformatique l'a enlevé ?
Cet accord faisait suite à la proposition, à l'espérance, de 1995 de parvenir à 120 g/km en 2012, on sait déjà qu'il ne sera pas atteint. Les prévisions les plus optimistes sont de 155 g/km en 2008, avec de fortes disparités entre les pays. En 2006 par exemple, la voiture neuve moyenne rejetait 144 g/km de CO2 au Portugal, mais 187 g/km en Suède. On ne sera pas à 140 g/km en 2008, et quelque soit le discours des constructeurs, ou d'Angela Merkel, la chancelière allemande qui défend légitimement l'industrie de son pays, ils devraient reconnaitre qu'ils n'ont pas respecté leur parole. Alors que la commission s'était montré très conciliante, puisque l'objectif ancien de 120 g/km pour 2012 avait été assoupli à 130 g/km, avec l'idée que l'incorporation de biocarburants, et des pneumatiques plus performants, entre autres petites choses, ferait la jointure avec les 120 g/km.
La commission a alors tous les droits de suggérer des amendes considérables pour les constructeurs qui ne seraient pas à l'objectif voulu en 2012, et de fixer des objectifs plus ambitieux encore : 95 g/km en 2020, et 70 g/km en 2025. Les constructeurs n'ont rien à dire, sinon que pour respecter l'équité (on ne voit pas pourquoi le droit à polluer coûterait plus ou moins cher d'une industrie à l'autre), le montant de ces amendes ne doit pas être proportionnellement plus élevé que le coût du CO2 dans l'industrie, ce qu'il est actuellement, et de manière considérable, à la limite du sensé. PSA a calculé que s'il ratait son objectif de réduction de 5 grammes, il aurait en 2012 une amende de 985 millions d'euros (source : CCFA). Cela fait cher le gramme !
Mais la plus puissante BMW fait plus de 500 ch, la plus puissante Mercedes plus de 600 ch, Audi a présenté sa RS6 de 560 ch, la nouvelle Lexus va à 270 km/h, et le nouveau Toyota Land Cruiser fait plus de 2500 kg à vide. Il faut que les constructeurs comprennent que le toujours plus puissant, plus rapide et plus lourd n'a plus d'avenir. Ou sinon avec une motorisation électrique alimentée par une pile à combustible nourrie à l'hydrogène...
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