Dakar, la fin mais pour des mauvaises raisons
Dim 06/01/2008 — La course des riches parmi les pauvres. La colonisation soft où on renverse les autochtones par jeu. On croyait avoir tout entendu sur le Dakar, on se trompait.
500 connards sur la ligne de départ. La chanson de Renaud ne faisait pas dans la dentelle. Depuis toujours, le Dakar avait ses ennemis, et il avait aussi ses victimes. A commencer par le créateur de l'épreuve, Thierry Sabine décédé en 1986 lors d'un accident d'hélicoptère. Les autres étaient des concurrents malchanceux, soit des badauds innocents, non préparés au passage de bolides devant eux (ce qui arrive aussi en France). Mais en dépit de tous ces accidents, le Dakar avait survécu, et c'était sa trentième édition, elle n'aura pas lieu. Et si elle a lieu l'année prochaine, ce qui serait presque étonnant, ce ne sera plus du tout le rally qu'on a connu. Le rally avait abandonné Paris comme ville de départ, il serait maintenant question qu'il abandonne Dakar comme ville d'arrivée. Et tout cela pour de mauvaises raisons. Bien sûr qu'il n'est pas écologique de traverser le plus vite possible, dans un engin peu respectueux des normes anti-pollution, des zones où habituellement l'homme n'est pas.
Mais sait-on que si le Dakar a beaucoup de détracteurs dans nos contrées riches, pour l'africain moyen dans son village où il ne se passe jamais rien, le passage de la caravane du Dakar est la plus belle fête de l'année ? Le Dakar n'est d'ailleurs pas qu'une course, il y a de nombreux petits projets humanitaires autour de son passage. Sans lui, les africains resteront repliés sur eux-mêmes, ou pire sur les terroristes. Et là, il est vrai qu'il n'est pas dans la compétence normale d'un organisateur de rally que de savoir affronter une menace terroriste. Il n'est donc plus possible de faire une course en Mauritanie, ni au Niger, ni au Nord du Mali, ni au Tchad, ni au Sud de l'Algérie. On ne peut plus rien faire nulle part, et surtout pas en France. Même si ce n'est heureusement pas pour les mêmes raisons, le Dakar était déjà parti. Le rally de Monte-Carlo qui part dans quelques jours est très loin de ce qu'il était il y a 30 ans. Et s'il était relativement facile d'organiser une course de côte dans les années 1980, ce ne l'est plus du tout en 2008.
Tout le sport auto sera bientôt sur circuit, encadré par des pace-cars, des commissaires de piste, et des règlements de plusieurs centaines de pages. Le pilote est un professionnel licencié, vacciné, tatoué, choisi autant pour son talent que son sourire, et le spectateur est un client payant, dont on essaie d'extraire le maximum par la vente de produits dérivés (casquettes, DVD, etc...). L'amateur d'aventure hors des sentiers battus, et il y en avait encore qui participaient au Dakar, celui à qui on va rembourser ses frais d'inscription, mais dont les mois de préparation sont perdus, n'a plus sa place. Merci à Ben Laden et sa clique. L'annulation du Dakar est une petite bonne nouvelle pour l'environnement, mais c'est une catastrophe pour le sport, l'aventure humaine, et le développement des régions traversées.
Photos : Mitsubishi, multi-vainqueur de l'épreuve.
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