L'exemple du péage urbain abandonné
Lun 14/04/2008 — La ville de New York avait le projet d'instaurer un péage urbain, le projet est tombé à l'eau. Tant mieux.
Le discours politique américain est différent de l'européen. Quand en France on évoque le péage urbain comme un acte d'écologie politique, les américains parlent très librement d'une politique d'économie de marché, avec la mise en place d'une sélection par l'argent pour limiter l'accès à des ressources limitées : les voies publiques de la presqu'ile de Manhattan. Nous avions décrit le projet l'année passée, il avait été approuvée par le conseil municipal, mais c'est l'assemblée de l'état de New York, dont l'approbation était nécessaire puisqu'il s'agissait de la mise en place d'un nouvel impôt, qui a enterré le projet. Et sans se justifier, elle n'en a pas besoin. C'est l'occasion d'une réflexion approfondie sur le péage urbain, avec d'autant plus d'opportunité que la mairie de Londres, qui a déjà mis en place un péage local, et qui souhaite l'étendre, est dans l'embarras. Porsche l'a montré, le soutien populaire dont prétendait bénéficier la maire n'est pas prouvé, et les effets bénéfiques du péage (en terme de réduction des émissions de CO2, ou des embouteillages) encore moins, ce serait même le contraire, puisque le péage multiplie le trafic autour de sa zone d'application.
Le péage urbain pose 2 problèmes. Le premier est celui du droit d'un maire à taxer la circulation d'une automobile dans tout ou partie de sa commune. Il y en a qui voudraient un péage à Paris, et pourquoi pas dans les villes de la petite couronne aussi ? 36 000 communes en France, 36 000 péages distincts ? En Angleterre, c'est Manchester qui pense maintenant à instaurer un péage urbain, et au-delà de la question locale, il faudrait réfléchir en premier lieu à un cadre juridique national, pour définir qui peut instaurer un péage, et dans quelles conditions. Parce que si les maires étaient totalement libres, on craint l'arbitraire qui créerait des disparités entre les péages que pourraient instaurer Neuilly ou Montreuil. Le second problème, immense, est celui de l'échec de l'aménagement du territoire. Si la population était mieux répartie, il n'y aurait pas des embouteillages quotidiens dans certains endroits, quand c'est le désert dans d'autres. Les délocalisations en province ont le grand tort de ne rien rapporter, mais il n'y a aucun besoin à ce que la plus grande ville universitaire de France soit sa capitale. Et on attend toujours une politique de développement du télé-travail. Voyons le péage urbain comme ce qu'il est : un signe d'impuissance à résoudre les vrais problèmes. Car si on veut vraiment réduire la pollution plutôt que faire rentrer de l'argent, il n'y a qu'à faire des rues piétonnes, ou interdire la circulation des véhicules équipés d'un moteur à combustion interne.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé :
hors-constructeur ; politique-transport_monde