Sarkozy lance la voiture décarbonée
Ven 10/10/2008 — En visite au salon de l'auto, le président organise le soutien à la voiture propre.
C'est après avoir fait le tour des stands des constructeurs français, que le chef de l'état a prononcé un discours, il y a d'abord confirmé des idées qui étaient dans l'air. L'exemption du malus pour les voitures fonctionnant au superéthanol E85 par exemple. Pour les particuliers qui choisissent de payer le supplément exigé par un modèle Flex-Fuel, il est regrettable de devoir s'acquitter d'un malus ! Le président a annoncé qu'il y aurait désormais exemption. Il n'a toutefois pas fait mention d'un seuil limite. Nous espérons que le décret qui matérialisera l'idée en aura un, car ce serait une erreur d'exempter de malus un Hummer Flex-Fuel. La disparition du SP98 ensuite, qui est programmée de longue date (la quasi-totalité du parc européen accepte le SP95). Il sera remplacé par l'E10, un mélange de 90 % de SP95 avec 10 % d'éthanol, l'indice d'octane est équivalent. Banalité ensuite que la France doit devenir un modèle pour les biocarburants de seconde génération, cela fait 5 ans qu'on entend cela, mais M. Sarkozy a aussi exprimé des idées nouvelles, avec même un mot nouveau : décarboné. Il ne faudra bientôt plus dire voiture propre, on dira plutôt voiture décarbonée. Mais qu'est-ce que cela veut dire, M. Sarkozy a eu l'habileté de le préciser. Il s'agit d'une voiture qui est soit électrique, soit hybride rechargeable. Plus avant, le président a aussi fait une analogie avec le bonus à 5000 euros pour les autos qui rejettent moins de 60 g/km de CO2, ce seraient elles les voitures décarbonées.
Pour ces autos, le président annonce un plan de recherche et développement, avec un financement public d'un montant de 400 millions d'euros, sur 4 ans. C'est dire que vu le coût du développement d'un nouveau modèle, l'aide gouvernementale n'ira pas loin... Mais M. Sarkozy a aussi évoqué la demande. Avec le fameux bonus de 5000 euros pour les autos qui rejettent moins de 60 g/km, dont il a assuré le maintien jusqu'à au moins 2012, ou jusqu'à son application à au moins 100 000 véhicules. Véhicules et pas voitures, car ce bonus actuellement limité aux voitures particulières, sera étendu aux utilitaires légers. Les premiers clients pourraient être l'état et les entreprises publiques, le président a justement appelé les responsables de parc a faire connaître leurs besoins d'ici la fin de l'année pour donner de la visibilité à l'industrie. Et sur ce même registre, le président s'est engagé à ce que l'état n'achète plus une seule voiture rejetant plus de 130 g/km de CO2 dés le 1er janvier prochain. Pour aller plus loin, le président a appelé à un déploiement massif des infrastructures de recharge pour véhicules électriques, notamment dans les nouvelles constructions, mais aussi sur les parkings de supermarchés.
Des paroles qui ont dû faire rêver Pierre Gadonneix, le pdg d'EDF qui était opportunément dans l'assistance, M. Sarkozy n'hésitant pas à le conforter dans son futur rôle-clé en disant que « ...EDF produira et distribuera le carburant... ». Alors que l'industrie pétrolière est déjà concentrée en un tout petit nombre de mains, la situation de l'automobiliste n'irait probablement pas en s'améliorant, si demain il n'avait plus le choix de son fournisseur d'énergie. Et du point de vue de l'environnement, quand les capacités de ce fournisseur ne donnent pas beaucoup de marge, il serait ennuyeux que l'automobile devienne l'outil justificatif à la construction de nouvelles centrales nucléaires... C'est pourtant ce qui risque d'arriver, avec le soutien tacite du président qui a plusieurs fois loué les mérites de cette énergie. Alors que ce même jour, nous apprenions avec joie que Vergnet, fabricant français d'éoliennes, avait signé un contrat de 220 millions d'euros pour la construction du plus important parc d'éoliennes d'Afrique. Le TGV, très gourmand en énergie, et qui ne sait la stocker, a besoin du nucléaire, il suffit de voir que tous les pays qui ont des trains rapides utilisent l'énergie atomique, mais pas les voitures. Alors que les services de M. Borloo travaillent déjà sur la maison à énergie positive, il serait adroit que les futures maisons équipées de bornes de recharge trouvent leur électricité sur place.
Au niveau européen, le président a souligné la difficulté d'obtenir un accord avec les autres pays de l'Union pour arriver à une réduction des émissions de CO2 des voitures d'ici 2012. Il importe pourtant d'y parvenir, car ne pas trouver d'accord serait la pire chose possible. Il a aussi évoqué l'idée d'un prêt de la Banque Européenne d'Investissement aux constructeurs, pour contrebalancer celui récemment accordé (à des conditions imbattables) par le gouvernement américain à son industie automobile. Mais il y aurait beaucoup à faire à Bruxelles pour faire passer ce projet.
Laurent J. Masson
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