Le gouvernement voudrait brancher le VE
Ven 20/02/2009 — Luc Chatel et Chantal Jouanno ont lancé la la stratégie nationale de déploiement des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques et hybrides.
Dans le cadre de l'engagement de la France pour la voiture décarbonée, initié l'année dernière par le chef de l'état, une réunion de travail a eu lieu le 17 février à l'Hotel Roquelaure, sous la double présidence de Luc Chatel, secrétaire d’Etat chargé de l’Industrie et de la Consommation, et Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie. La liste des participants était instructive, nous y avons vu les noms de Christophe de Margerie, directeur général de Total, et de Gérard Mestrallet, président directeur général de GDF/SUEZ. Autrement dit, le but de la réunion était de se préparer pour organiser le futur succès de la voiture électrique, mais on y avait invité les 2 plus gros marchands d'énergie carbonée (et fossile) du pays ! Ce ne fut pas une surprise ensuite, de voir que dans la liste de projets de recherche qui vont recevoir des subventions, l'Institut Français du Pétrole est impliqué dans 2. Le gouvernement a t-il eu peur d'être critiqué pour son sectarisme s'il avait interdit la participation de tout membre de l'industrie pétrolière ? On suppose qu'il faut plutôt y voir son esprit d'ouverture, mais nous attendons de voir la première manifestation de soutien à la voiture électrique de la part d'une compagnie pétrolière... Absence remarquée ensuite, l'industriel français le plus proche de mettre une voiture électrique sur le marché, Vincent Bolloré, n'était pas là.
Bon, mais précisons l'objectif, il s'agit « d’élaborer un plan de développement des infrastructures de recharges (domestiques, sur le lieu de travail, sur la voie publique ou de bornes de recharge rapide) et de stations d’échange de batterie, pour garantir au consommateur un usage du véhicule similaire à celui des véhicules actuels. » Pouvons-nous rappeller que les 2 voitures les plus vendues dans l'hexagone, sont les Peugeot 207 et Renault Clio ? En motorisation diesel, elles ont une autonomie de 1000 km. Comment peut-on faire croire aux gens qu'une voiture électrique qui aura une autonomie de 200 km, se conduira pareille qu'une qui peut faire 1000 km sans s'arrêter ?
La France a déjà tentée de lancer la voiture électrique il y a 50 ans avec la Dauphine (photos) et il y a quelques années, avec des 106, des Saxo et des Kangoo, mais le succès commercial n'a pas été au rendez-vous. Même si la conscience environnementale du français moyen a grandie, ce n'est assurément pas en faisant des fausses promesses que cela va mieux marcher cette fois-ci. Rien cependant n'est encore définitif, puisque cette réunion du 17 aura surtout servi à organiser les groupes de travail. Il y a aura un groupe « Modèles économiques » pour établir les pistes par lesquelles le véhicule électrique sera rentable. Après, un groupe « Expérimentations » pour comme son nom l'indique tester la technologie. Ensuite un groupe « Standardisation et normalisation » pour assurer que toutes les futures voitures électriques adopteront un langage commun dans l'hypothèse d'un besoin de communication entre l'auto et le réseau. Et finalement un groupe « Législation et réglementation » pour adapter le droit français à la voiture électrique. S'il y en a qui doutaient que la France soit un état technocratique, tous les doutes sont levés ! Mais il reste que pour ce qui concerne le plus important, la mise en place de nombreuses bornes de recharge sur les voies publiques, c'était le titre de la réunion, il n'y a pas un mot sur le financement. Alors que s'il faut installer des dizaines de milliers de bornes partout sur le territoire, ceci va coûter une petite fortune. L'état, les collectivités locales, EDF, qui va payer ? M. Jean-Louis Legrand, le nouveau coordinateur interministériel pour les véhicules décarbonés, va devoir dire rapidement d'où viendra l'argent...
La meilleure nouvelle de la journée enfin, n'est pas venue du gouvernement, mais de la coordination de grands gestionnaires de flottes (l'état, La Poste, France Telecom...), pour définir un cahier des charges commun, et unique, pour un véhicule électrique qu'ils s'engageraient à acheter conjointement à 100 000 exemplaires d'ici 2012. Il n'est jamais trop tard pour bien faire, mais nous nous rappellons d'un appel d'offres de La Poste pour 500 véhicules électriques, le 18 avril 2007. Venturi/PSA et Fiat/Newteon avaient répondu, mais La Poste n'a toujours acheté aucune voiture 2 ans après. Et elle n'en a vraisemblablement plus le projet, puisque l'aboutissement de cette réunion du 17 février fut de se mettre d'accord pour lancer un nouvel appel d'offres au second semestre de cette année. Alors nous attendons de voir, avec enthousiasme puisque ce futur appel d'offres sera bien plus important que celui d'il y a 2 ans, mais en sachant qu'il va falloir faire preuve d'encore plus de patience, parce que si des petites structures pouvaient répondre à un appel d'offre de 500 véhicules, les infrastructures industrielles qui permettraient de répondre à une commande groupée de 100 000 véhicules électriques n'existent pas. On va les construire !
Laurent J. Masson
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