Le bonus-malus va t'il dériver ?
Lun 19/10/2009 — La crise économique a plombé le dispositif, le transformer en impôt n'est pas anticiper l'après-crise.
Hervé Mariton, député de la Drôme, vient de publier un intéressant rapport sur l’évaluation des effets économiques du bonus-malus écologique et de la prime à la casse. Ce rapport va servir de base à la reflexion qui doit conduire à la révision du dispositif, et il présente un bilan comme des idées. Par exemple celle d'une fusion entre le bonus-malus et la prime à la casse. Ce qui d'emblée nous semble critiquable, en ce que la prime à la casse introduit des distorsions sur le marché. Des vraies distorsions dans le sens où les consommateurs ne sont pas sur un même pied d'égalité. Parce qu'au contraire du bonus-malus qui concerne toute personne au moment d'acquérir une voiture neuve, la prime à la casse ne bénéficie qu'aux personnes qui ont une auto à détruire, de plus de 10 ans. Sur ce point particulier, il faudrait d'ailleurs songer à règlementer mieux la publicité des constructeurs, qui met souvent en avant le prix avec déduction de la prime à la casse d'une voiture de plus de 10 ans, et tant pis pour ceux qui n'en ont pas. Mais M. Mariton n'évoque pas ce point, à aucun moment de son rapport d'ailleurs, il ne se met dans la peau d'un consommateur. En toute logique avec sa fonction, le député se positionne comme législateur, mais quel choc alors de lire dans son rapport que « un dispositif de bonus-malus n'a pas vocation à être équilibré » !
L'état a t-il le devoir de subventionner éternellement les automobilistes les plus vertueux dans le choix de leur future auto ? Ceci est nouveau. Sans doute le fruit de l'époque où après des décennies de déficit budgétaire toujours croissant, on a oublié que les finances publiques avaient elles aussi vocation à l'équilibre. M. Mariton a néanmoins un argument en sa faveur : toutes les prévisions relatives aux recettes et dépenses du bonus-malus se sont révélées fausses. La prévision initiale (de 2007) était en effet d'un budget à l'équilibre, sur 483 millions d'euros pour l'année 2008. La prévision de recettes était la plus fausse, elles ne se sont montées qu'à 225 millions. 53 % de moins que prévu. Mais la prévision de dépenses était également erronée. Elle ne s'est élevée qu'à 439 millions. Autrement dit, et contrairement à ce qu'on entend et lit partout, le bonus a eu moins de succès que prévu. 9 % de moins. La crise économique est passée par là. Et si dispositif du bonus-malus est globalement un succès écologique, par une réorientation du marché vers les modèles qui rejettent le moins de CO2, c'est alors plutôt parce que les français ont moins d'argent pour s'acheter des grosses voitures. Tous les automobilistes ne sont pas devenu écologistes en quelques mois !
Une révision du système impliquerait donc de recalculer les montants des différents bonus et malus avec les nouveaux paramètres économiques. Mais profitant de la gestion maladroite du dispositif par le biais d'un compte de concours financier, M. Mariton propose d'intégrer tant le bonus que le malus au budget général de l'état, où ils ne seraient plus liés. Le malus serait un impôt, le bonus serait une subvention. Et si à l'avenir, par le jeu de révisions annuelles, le malus venait à rapporter plus à l'état que le bonus ne lui coûte, personne n'aurait rien à dire... Ce qui remet complètement en cause le système, dont la première idée était la neutralité de l'état face au dispositif. Comme pour la taxe carbone. Des téléviseurs aux motos, il y a plus de 10 produits pour lesquels le gouvernement devrait appliquer un système bonus-malus. Le respect de l'idée initiale du bonus-malus, voudrait que chacun soit équilibré indépendemment des autres. Et maintenu à l'équilibre. Pour les voitures, M. Mariton écrit sans aucun argument que cela ne serait pas possible. OK, mais l'idée de fiscalité écologique ne sera alors plus qu'un camouflage pour de nouvelles taxes sur la consommation, accompagné d'un système de bon point à quelques-uns.
Laurent J. Masson
Illustrations : des voitures avec bonus de 1000 euros.
Ford Fiesta Econetic, Seat Ibiza Ecomotive et Smart Fortwo CDI.
Rubrique(s) et mot(s)-clé :
hors-constructeur ; bonus-malus-prime-taxe