Les Mercedes interdites ne le sont plus
Mer 28/08/2013 — Mais tout le monde est perdant dans cette affaire.
C'était une nouvelle choc, la France interdisait l'immatriculation des Mercedes classe A, B, CLA et SL au motif que le gaz réfrigérant employé par leur système d'air conditionné n'était pas conforme au droit européen. Le gouvernement français appliquait la procédure d'urgence absolue, comme si des vies étaient en jeu. Du grand n'importe quoi, et le conseil d'état vient d'y mettre bon ordre, en obligeant la France à reprendre sous 48 heures l'immatriculation de toutes les Mercedes qui avaient été interdites. Et cette décision n'est pas susceptible d'appel, mais si cela pare au plus pressé, l'affaire aura causé beaucoup de dégats. Le premier est que la France va passer en Allemagne pour un pays de guignols. Ce n'est pas la première fois... Les clients ensuite se rappelleront longtemps avoir commandé une auto, et l'avoir reçu avec plusieurs semaines de retard. Il y a aussi plusieurs concessionnaires qui ont été dans des situations financières difficiles, parce que l'argent des voitures vendues ne rentrait plus. Mais en cherchant les fautifs, on en trouve aussi chez Mercedes. Le groupe Daimler a fait une erreur.
Les ingénieurs ont fait leur travail, mais le service juridique aurait dû dire : Attention, ce choix technique est potentiellement litigieux. Ou l'a t-il fait sans que ce soit ébruité ? Analysons les faits. Le premier gaz réfrigérant était le R12 (le fréon), qui a été interdit il y a 25 ans par le protocole de Montreal. Il y a 10 ans, on se rend compte que son remplaçant, le R134a, a lui aussi un pouvoir de réchauffement global (PRG) bien trop élevé en cas de fuite. Une majorité de constructeurs choisit de le remplacer par le gaz 1234yf, mais pas Mercedes, qui le juge inflammable. Toyota a récemment conforté Mercedes dans ce choix. Mais l'Australie a déjà légiféré contre le R134a, et la Californie devrait aussi l'interdire prochainement. Ecrivons les choses clairement, il y a un consensus mondial entre la majorité des législateurs, comme des constructeurs auto, pour abandonner le R134a.
Ce n'est certes pas un motif suffisant pour interdire les autos, mais Mercedes est dans une impasse s'il veut maintenir l'emploi de ce gaz, et il doit le savoir. La seule solution valable serait de proposer un autre gaz que le 1234yf. A quand les climatisations au CO2 ? Car rien n'est réglé. La décision d'hier du conseil d'état a un effet immédiat, mais elle n'est pas la décision finale, qu'il faudra attendre plusieurs mois. Sans compter que l'affaire est aussi en cours à Bruxelles, puisque l'interdiction du R134a provient de là. Mercedes peut raisonnablement espérer obtenir une dérogation temporaire, éventuellement assorti d'une pénalité financière.
Il reste que si la réaction de la France a été stupide, il peut y en avoir d'autres. Pour sortir de cette affaire la tête haute, Mercedes a besoin d'un plan B.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : Mercedes ; ecologie