Carlos Ghosn, le retour d'un géant
Jeu 09/01/2020 — Toujours un battant.
On a eu peur. On s'interrogeait. Après la prison, après l'isolement forcé, avec interdiction de voir sa femme, de se connecter à Internet, mais la conférence de presse d'hier nous a rassuré. Carlos Ghosn est toujours Carlos Ghosn. Un sacré bonhomme. Capable de donner une conférence de 147 minutes, et de répondre aux questions des journalistes présents en 4 langues (français, anglais, arabe et portugais), avant d'enchainer plusieurs heures d'interviews individuelles. Et dans ses propos, M.Ghosn s'est montré pugnace, pointant du doigt une collusion entre des cadres dirigeants de Nissan, le procureur japonais et des hommes politiques derrière lui pour le faire tomber. Alors qu'il a réitéré son innocence, expliquant même qu'il n'aurait jamais dû être arrêté. M.Ghosn a d'ailleurs démonté toutes les accusations faites à son encontre, expliquant, démontrant, qu'elles étaient infondées. La première étant un défaut de déclaration de cetains revenus, alors qu'il ne les a jamais touchés. En France, on pense aussi au cadeau qu'on lui avait fait, la location d'une salle à Versailles, un maigre avantage quand Renault avait signé une convention de mécénat avec le chateau, pour un montant d'un million. Comme un concessionnaire qui offre une option quand il vend une voiture.M.Ghosn a tout expliqué, et il se dit même capable de le faire encore mieux une fois qu'il aura réuni les documents qu'il ne pouvait obtenir, lorsqu'il était sous le strict contrôle de sa liberté surveillée au Japon. Liberté surveillée qui allait s'éterniser, puisque ses avocats lui avaient expliqué que le procès relatif à la première accusation contre lui durerait probablement 5 ans. Le choix était donc entre mourir au Japon, ou faire la belle... Il aura choisi la seconde option, il a bien fait. Maintenant, si M.Ghosn réclame la justice, argumentant longtemps qu'il ne pouvait l'obtenir au Japon, il reste toutefois diplomate. Quand on lui a demandé s'il s'était senti abandonné par la France, il a répondu par une question au journaliste, lui demandant ce qu'il aurait ressenti dans sa position. Et quand on lui a demandé de nommer les responsables politiques nippons qui ont appuyé son arrestation, M.Ghosn a répondu qu'il se tairait pour ne pas envenimer les relations déjà tendues entre le Liban et le Japon. Et parce qu'il a le sens de l'amitié, il aura aussi défendu Greg Kelly, un comptable américain arrêté en même temps que lui, et Thierry Bolloré, récemment renvoyé de Renault, alors que le conseil d'administration l'avait nommé dirigeant à l'unanimité, à peine quelques mois plus tôt.
Carlos Ghosn n'a pas fini de faire parler de lui. Contrairement à ce que beaucoup croient, s'il a démissionné de son poste de PDG, puisque dans l'impossibilité d'exercer cette fonction, il n'a pas quitté Renault. L'équipe actuelle a déclaré vouloir tourner la page Ghosn, et c'est bien ce qu'elle a fait. Nissan a perdu 10 milliards de dollars de capitalisation boursière, Renault, 5 milliards d'euros. Pendant ce temps-là, la concurrence gagnait quelques 12 %. Carlos Ghosn veut la vérité, et la prémière est que cela allait mieux quand c'était lui le patron.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : Nissan ; industrie-production