Quand Elizabeth Borne rêve de s'attaquer aux normes sur le CO2
Mar 21/01/2020 — Sans espoir ?
Lors de ses vœux à la presse, Mme Elizabeth Borne, ministre en charge de l'écologie, a rappelé que « ...Il y a quelque chose d'un peu absurde dans les textes européens actuels, c'est le fait que quand les véhicules sont plus lourds alors ils ont le droit d'émettre plus de gaz à effet de serre... ». Elle évoquait donc les objectifs différenciés qui ont été fixé à chaque constructeur. Chaque constructeur doit réduire les émissions de CO2 des voitures qu'il construit, il y a un objectif d'émission moyenne pour chaque constructeur, et Mercedes, par exemple, a un objectif plus élevé que, par exemple, Fiat. Pourquoi cela ?Ceci n'a en fait rien d'absurde, et Mme Borne, qui est polytechnicienne, doit bien le savoir. Une grosse voiture comme une Mercedes classe G requiert plus d'énergie qu'une petite auto comme une Fiat Panda. C'est comme cela qu'après de longues années de négociations, on était arrivé à un consensus pour donner à un constructeur qui fabrique surtout des grosses voitures, comme Mercedes, un droit à une moyenne d'émission de CO2 plus élevée, qu'un constructeur qui fabriquerait surtout des petites voitures, comme Fiat. On peut critiquer ce système, mais on ne peut pas dire qu'il est absurde. D'ailleurs, si on compare des voitures électriques à zéro émission, une grosse Tesla Model X consomme plus d'énergie qu'une petite Renault Zoé, et c'est normal.
La suite du propos de Mme Borne fut d'appeler à une révision du droit européen, et là, il ne faut pas se leurrer, c'est très mal parti. Bien sûr, il est facile à la France de demander une révision du droit européen, mais encore faut-il que les autres pays soient d'accord. On sait que l'Allemagne sera contre, puisqu'elle protègera son industrie qui fabrique les plus grosses voitures d'Europe. Et l'Allemagne n'est pas toute seule. Les gros SUV Volkswagen Touareg et Porsche Cayenne sont fabriqués en Slovaquie. Dans l'une des plus grandes usines de ce petit pays ! Aucun doute que les slovaques se rangeront derrière les allemands. Idem les hongrois et les tchèques, qui bénéficient eux aussi de multiples investissements de l'industrie auto allemande. Les baltes (Lituanie, Lettonie et Estonie) suivront ce mouvement, et cela fait donc déjà 7 pays qui seront contre la proposition française. C'est très, très mal parti pour arriver à un consensus, et... Mme Borne doit le savoir.
Il est plus que probable que la ministre ait lancé cette idée rien que pour occuper l'espace médiatique... Au cas où Mme Borne voudrait se rendre utile, on lui rappelera qu'il y a beaucoup à faire pour l'écologie en France, pour que les trains partent et arrivent à l'heure, et que beaucoup de vieux autobus diesel pourraient être remplacés par des véhicules électriques. Enfin, au niveau des bornes de recharge pour les automobilistes qui font le choix de rouler électrique, il y a là aussi grandement à faire, et sans rien demander à aucun partenaire européen.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : hors-constructeur ; politique-transport_Europe ; ecologie