Nio, constructeur automobile, et de smartphones
Lun 09/10/2023 — Exemple à suivre ?
C'est venu doucement. Les voitures ont commencé par être équipées de radios. C'était peu après la seconde guerre mondiale. Puis des lecteurs de cassettes, puis de CDs, puis de MP3s. Et comme on avait aussi des MP3s sur nos téléphones mobiles, il est venu l'idée de brancher le smartphone sur la voiture. Dans le même temps, au nom de la sécurité, on a inventé l'e-call. Dans l'union européenne, la législation l'a même imposé. Si la voiture est accidentée, que l'airbag s'est déclenché, une carte SIM présente dans le véhicule appelle automatiquement les secours. Il y a eu aussi la navigation. Il y avait des systèmes embarqués dans les voitures, mais la navigation du smartphone était souvent plus pertinente, car mise à jour plus fréquemment. Et ces 2 industries qui n'avaient à priori rien à voir, construction automobile et fabrication de smartphones, se sont rapprochées l'une de l'autre.Les rapprochements se sont récemment intensifiés, et presque toutes les voitures neuves aujourd'hui, ont une compatibilité Apple carplay et Android auto. Beaucoup de constructeurs ont sorti leurs propres applications, qui permet de verrouiller l'auto, chauffer ou refroidir l'habitacle avant de prendre le volant, vérifier le niveau de carburant ou de charge batterie, etc... On attend aussi qu'un fabricant de smartphones devienne constructeur automobile. Il y a depuis 10 ans une rumeur qu'Apple va se lancer dans cette arène, mais on ne voit rien venir. Du côté de la Chine par contre, il n'y a plus de doute. Foxconn, le géant de l'électronique, sous-traitant leader d'Apple, a déjà présenté des prototypes, et Xiaomi, présentera sa première auto sous peu. Mais ce que peu de gens avaient imaginé, est qu'un constructeur auto devienne fabricant de smartphones.
C'est ce que vient de faire Nio. Ce n'est pas un grand constructeur, il vendra moins de 200 000 voitures cette année, mais il vient de présenter un smartphone très haut de gamme. Ecran de 6,81 pouces, 12 GB de mémoire vive, 500 GB pour stocker ses données, batterie de 5200 mAh, cela coûte un peu plus de 800 €, mais ce n'est pas vraiment (dans un premier temps ?) destiné au grand public. C'est plutôt une option pour les clients d'une voiture Nio.
Et le constructeur d'expliquer qu'en fabriquant le smartphone et l'auto, il a pu mettre en place une intégration plus poussée que s'il n'avait fabriqué que la voiture. Parce que Nio ne s'est pas contenté de fabriquer le smartphone, il a aussi écrit son propre système d'exploitation. Pour les smartphones, et dans une autre version pour les voitures (mais les deux sont liés). Dans le détail, le système d'exploitation pour les smartphones est basé sur Android, mais profondément modifié, puisque l'utilisateur ne voit plus les publicités de Google, et que Nio a aussi développé son propre magasin d'application (pour concurrencer Google Play), il y en a déjà plus de 40.
Ce n'est cependant pas une première, puisque Renault avait à peu près cela pour la Zoé, il y a 10 ans. Le résultat ne fut pas fameux (!), Nio a assurément fait beaucoup mieux, mais Renault aujourd'hui a préféré aujourd'hui s'associer avec Google. Ce qui n'est peut-être pas une bonne idée, puisque pour bénéficier de toutes les fonctions offertes par le système, sur une Megane E-Tech ou une Austral, il faut obligatoirement partager des données avec Google. On ignore ce qu'il en sera chez Nio. Les données afférentes aux conducteurs de Nio sont-elles partagées avec une autre société chinoise ? Avec l'état chinois ?
Nio se distingue aussi en ce qu'il fabrique la plupart de ses composants électroniques, il fabrique ainsi le microprocesseur qui sert au lidar, pour faire fonctionner le système de conduite autonome (partielle) des autos. Aucun constructeur européen ne sait faire cela. Nio fabrique aussi ses propres bornes de recharge, DC de 500 kW, et même des stations d'échange de batterie. Nio sait donc faire des choses que les européens ne savent pas faire. Mais il n'est pas établi (encore ?) que cela lui procure un avantage commercial, et on s'interroge sur le devenir des données personnelles.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : Nio ; technologie