Stellantis sur le chemin de la décroissance
Lun 21/10/2024 — Le mouvement est enclenché.
Le stand Peugeot avait une connotation toute particulière au salon de l'auto, puisqu'il mettait en avant l'origine française, bleu-blanc-rouge, des voitures exposées. Peugeot, c'est français. Mais y a t-il eu un seul visiteur du salon qui ne le savait pas ? Il est peu courant qu'un constructeur ait recours à la fibre patriotique pour promouvoir ses autos. C'est tout ce qu'ils ont trouvé ? On aura surtout remarqué que les modèles que Peugeot vend le plus, les 208 et 2008, fabriquées en Slovaquie et en Espagne (respectivement) étaient absentes du stand. L'argument est donc assez fallacieux, d'autant plus que si les 308, 3008, 408 et 5008 sont effectivement produites en France, la société Stellantis n'est pas française, et son premier actionnaire, John Elkann, non plus.Ce qui est 100 % vrai par contre, est que Peugeot aurait bien besoin d'être boosté en France. Sur les 9 premiers mois de l'année, Peugeot a vendu 177 394 voitures en France, et Renault, l'éternel rival, 203 527. Quand la marque au losange a des dizaines de milliers de commandes en attente pour sa nouvelle 5 électrique, ce n'est pas demain que la tendance va s'inverser. Et certainement pas avec la nouvelle Peugeot e-408, moins puissante et avec une plus petite batterie que la Renault Megane E-Tech, pourtant du segment inférieur. Le coupable de cette situation est connu, c'est le sous-investissement chronique dicté par Carlos Tavares. Les modèles ne sont pas renouvelés assez rapidement. La différence est flagrante par rapport aux marques asiatiques. C'est ainsi que la Fiat Panda a plus de 10 ans, alors les clients se font rares, et l'usine va connaître plusieurs phases de chomâge technique.
Le cas de la Fiat Panda n'est malheureusement pas un exemple isolé. Aux Etats-Unis, le descendant du fondateur de Chrysler, catastrophé par la spirale descendante de Chrysler et Dodge, avait écrit à Carlos Tavares pour lui proposer de reprendre les marques américaines du groupe. Tout le monde s'émerveillait des résultats financiers formidables de Stellantis en 2022 et 2023, mais ils ne sont que les fruits véreux d'une politique de réduction des investissements, et d'une focalisation sur la maximalisation des profits autour des modèles existants. Rationnement des gammes, et spécialisation autour des versions dégageant les plus fortes marges. Les marques vendent moins que naguère, mais comme elles ne vendent plus que les modèles les plus profitables, les bénéfices étaient en hausse.
Stellantis a froidement choisi de vendre moins pour gagner plus, et il va continuer encore plus fort dans cette voie l'année prochaine. On le sait, en Europe, les constructeurs sont dans une passe difficile puisque la législation leur impose une proportion substantielle de ventes avec des électriques, pour éviter de lourdes amendes. Tous les constructeurs sont debout contre cette législation, et demande une révision de la loi, tous, sauf Stellantis. Et Jean-Philippe Imparato, nouveau Chief Operating Officer de Stellantis, s'est dit prêt à réduire les volumes de production des modèles essence pour rester dans les clous. Tous les autres constructeurs veulent une révision de la loi, font du lobbying pour cela, ils veulent vendre le plus possible de voitures, mais pas Stellantis, qui préfère réduire ses volumes de production. Ils choisissent la décroissance.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : Stellantis ; commerce-distribution