Non au pétrole dans le tournesol
Ven 09/09/2005 — Mme Nelly Olin, ministre de l'Ecologie et du Développement Durable, a apporté quelques précisions sur la volonté du gouvernement sur le sujet des biocarburants, les français ont plusieurs raisons de s'en inquiéter.
Mme Olin a pourtant d'abord réjoui tout le monde, en indiquant que le gouvernement avait l'intention d'accélérer le développement des biocarburants, et d'atteindre l'objectif européen de 5,5 % de biocarburant dans le total des carburants consommés dans le pays dés 2008, alors que la directive européenne avait prévu 2010. On voudrait alors aller féliciter Mme la ministre pour l'ambition du projet gouvernemental, mais il y a quelque chose de franchement mystérieux, et même d'anormal, dans les moyens d'y parvenir. Mme Olin a en effet expliqué qu' « une concertation est en cours entre le Gouvernement, l’industrie pétrolière et les professionnels agricoles pour examiner les conditions de ce développement », et « le Plan Biocarburants sera accéléré par de nouveaux appels d’offre qui vont nous permettre d’atteindre le taux de 5,75% dès 2008 ».Le plan biocarburants est-il classé secret-défense ? On est étonné d'apprendre de la bouche du ministre qu'une concertation soit en cours entre gouvernement, pétroliers et agriculteurs. S'agissant d'un sujet intéressant directement plusieurs dizaines de millions de français, et de questions de la plus haute importance comme l'indépendance énergétique du pays, pareille concertation devrait faire la une de tous les journaux. Mais personne n'était au courant. Et l'idée de réunir pétroliers et agriculteurs est-elle seulement bonne ? Les entreprises qui fabriquent du biodiesel en Allemagne sont-elles liées à l'industrie pétrolière ? Parce que quand on sait que Total a dégagé 3 milliards d'euros de bénéfices les 3 derniers mois (la hausse du pétrole, c'est dur pour les automobilistes, mais il y en a qui en profitent), face à des agriculteurs dont les revenus sont considérablement (mot faible) plus modestes, il n'est pas sûr que la concertation soit très équilibrée.
Le pire du pire étant que pour accélérer son plan biocarburants, le gouvernement entend lancer de nouveaux appels d'offre. Que l'on excuse notre candeur, mais dans l'esprit de la plupart des gens, on lance un appel d'offre quand on veut acheter quelque chose pour soi. Le gouvernement va t'il acheter du biocarburant aux agriculteurs pour en devenir le distributeur exclusif sur l'hexagone, avec l'ouverture de ses propres stations-service ? Ou le gouvernement va t'il acheter du biocarburant aux agriculteurs, et le revendre à Total, pour que lui le revende aux français, après avoir versé une juste commission au gouvernement fournisseur ?
On ne pourra alors que rêver d'un gouvernement qui ne chercherait pas à jouer au pompiste omnipotent et omnicontrôleur, mais qui serait maître du jeu, les mains loin de la pompe. Ce gouvernement serait un arbitre, qui édicterait un cadre législatif propre au développement d'une filière entrepreneuriale des biocarburants, simplement par la définition des normes et taxes applicables. Ce serait une politique libérale, tout le contraire ce qui est en cours.
Nous devons bien sûr féliciter le gouvernement pour son ambition de lancer enfin les biocarburants en France, la planète dira merci pour la réduction de gazs à effet de serre, mais de toutes les manières de parvenir à ce but, le gouvernement n'a vraiment pas choisi la meilleure.
Rubrique(s) et mot(s)-clé : hors-constructeur ; biocarburant