Le GPL-carburant, toujours artificiellement attrayant et faussement écologique
Un carburant à abroger Le GPL a quasiment disparu des catalogues des constructeurs en Europe de l'Ouest, mais il conserve un attrait pour quelques automobilistes de par une fiscalité avantageuse. C'est la mesure du retard de la politique sur l'industrie. Les constructeurs ont compris que le GPL n'avait plus d'avenir, mais pas encore nos dirigeants. Alors on voudrait enterrer le GPL, plus personne n'en parle, et même pas ce site, qui en 5 ans n'y a consacré que 5 articles. Mais tant que le GPL sera détaxé par rapport aux autres hydrocarbures, pourtant pas plus fossiles que lui, il suscitera un intérêt, d'autant plus grand que les carburants augmentent.
Le GPL n'est pas sans qualités. Il a par exemple une très bonne densité massique. Il y a plus d'énergie, en joules, dans un kg de GPL que dans un kg d'essence. Le GPL a ensuite un indice d'octane supérieur à l'essence. Il est ainsi possible de faire des voitures bicarburation plus puissantes au GPL qu'à l'essence. Mais preuve du peu de souci de rendement des fabricants de kits au GPL, personne ne le fait. Le seul que nous avons pu trouver est le préparateur allemand Steinmetz, dont le kit GPL pour l'Opel Astra turbo (ci-contre) accroît la puissance de 20 ch. Troisième et dernier avantage, des rejets de CO2 un peu plus faibles qu'à l'essence.
Un avantage mineur, inférieur à 10 %, et qui ne peut servir à justifier la détaxe du GPL, puisque comme nous l'avions montré l'année dernière, à rejet de CO2 égal,
le diesel est 50 % plus puissant que le GPL. En toute logique, le GPL devrait alors être nettement plus cher que le gazole. L'atout de la combustion plus propre du GPL n'est ensuite plus vrai. Même les montes GPL constructeur, étudiées avec les plus gros budgets, rejettent plus de polluants toxiques au GPL qu'à l'essence, comme l'a vu
chez Subaru. En sus de la fiscalité avantageuse, l'attrait du GPL repose alors sur l'irréel, ou des fausses croyances. L'une d'elles est par exemple qu'un moteur essence marcherait mieux au GPL.
Nous pouvons écrire sans aucun risque de nous tromper, que 100 % des voitures qui roulent au GPL en France ont un moteur qui n'est pas réglé de manière optimale. Il est même impossible de bien régler un moteur pour le GPL. Qu'est-ce que le GPL ? Un mélange de butane et de propane dans des proportions variables selon les saisons. Mais ces 2 gaz ont des propriétés bien différentes. Leur densité énergétique, leur teneur en carbone sont substantiellement différentes. Comment bien régler un moteur quand les propriétés de son carburant ne sont pas constantes ? Cela passe grâce à l'indice d'octane qui est plus élevé que l'essence, mais si on voulait faire du GPL un carburant valable, la première chose à faire serait d'en stabiliser les caractéristiques.
Deuxième fausse croyance, un énorme mensonge, le GPL serait un produit de récupération, qui si on ne le mettait pas dans les voitures, serait perdu, car brulé en haut des torchères sur les champs de pétrole. Une image étant plus parlante qu'un long discours, on verra ci-contre du gaz de pétrole brûler en haut d'une torchère. Flamme orange épaisse, grosse fumée noire. A droite, du GPL. Flamme bleue très claire, on voit presque au travers, il n'y a pas de fumée visible. Ce n'est pas du tout la même chose. Et s'il est possible de récupérer le gaz des torchères pour fabriquer du GPL-carburant automobile, le GPL obtenu ne représente même pas 20 % de la quantité de gaz de départ.
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C'est le moment de s'intéresser à l'origine du GPL. Petit inventaire, classé par bilan CO2 global, du meilleur au plus mauvais.
1/ Extraction sur le puitsCe n'existe à peu près qu'en Australie. A
Bass Strait par exemple, il y a des gisements de pétrole et de gaz naturel, qui contiennent des poches de propane. C'est le GPL naturel, il n'est pas fabriqué, mais extrait du puits. Malheureusement, ce GPL naturel est très rare, il ne représente même pas 1 % du GPL consommé dans le monde. Mais les australiens ont de la chance de pouvoir en disposer.
2/ Sous-production à la raffinerie de pétroleLes raffineries de pétrole qui produisent l'essence et le gazole, fabriquent du GPL dans leur cycle normal de fonctionnement. C'est un sous-produit de cette industrie, et la consommation de ce GPL est parfaitement légitime.
3/ Sous-production à la raffinerie de gaz naturelLe gaz naturel est un mélange d'une multitude de gaz. Le méthane y est toujours largement majoritaire, mais pour qu'il le soit à au moins 85/95 %, on écarte ces gaz minoritaires que sont principalement l'éthane, le butane, le propane ou le dioxyde de carbone. C'est par cette méthode qu'on produit plus de la moitié du GPL dans le monde.
4/ Production à la raffinerieCeci est distinct de la sous-production évoqué en 2. Il est possible de modifier le processus normal d'une raffinerie pour, à partir d'une quantité de pétrole donnée, produire plus d'essence, plus de gazole, ou plus de GPL. Les possibilités sont limitées, mais il y a une certaine marge de manœuvre. Cependant, elle exige un perdant. Si on veut produire plus de GPL, il faudra produire moins d'essence, ou moins de gazole. Cela peut se faire, mais il y a aussi la question des déchets de production, qui augmenteront propotionnellement à la hausse de la production de ces hydrocarbures légers que sont les GPL. Dans le meilleur des cas, produire plus de GPL conduira à produire plus de bitume, ce n'est pas motivant. Dans le pire, l'augmentation de la production se fera dans des pays peu regardants sur le retraitement des déchets de raffineries (le gras du gras du pétrole), et les déchets seront brûlés dans un coin où personne ne regarde. Dans tous les cas, la consommation d'énergie sera en hausse, le bilan CO2 en chute libre.
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Tirer une conclusion est très simple, car il suffit de s'appuyer sur les idées fondamentales de l'écologie. Par exemple la nécessité de
régionalisation d'une politique énergétique. Il est ainsi normal que l'Australie encourage la consommation de GPL, puisque ce pays a la chance de disposer de GPL naturel, mais cela ne vaut pas pour la France ou l'Europe. L'un comme l'autre manquent de GPL. Il nous faut alors savoir retenir,
limiter la consommation.Le triste exemple du Nigeria nous le demande. Un grand nombre d'habitants de ce pays font leur cuisine sur des feux de bois. Même dans les villes.
Déforestation et désertification en cours. Il y a beaucoup de GPL pourtant au Nigeria, les gens pourraient y avoir des réchauds au butane, mais ils ne peuvent pas avoir de butane : toute la production est vendue aux américains (et si cela fait rentrer des devises dans le pays, cela ne profite qu'à une minuscule minorité).
Nous avons franchi la ligne rouge, on peut faire un parallèle avec les biocarburants. Formidable idée que les carburants produits de l'agriculture, mais les contraintes de surface viennent limiter leur développement. Des 4 origines du GPL, le premier n'augmentera pas sauf découverte surprise peu probable, le second va se réduire puisque la qualité du pétrole moyen est en baisse (le brut est de plus en plus lourd et soufré), le troisième sera stable sauf augmentation de l'extraction de gaz naturel (pas impossible), et la seule variable possible est alors dans la quatrième. Tant pis pour les pollutions. Nous devons
tirer la meilleure exploitation possible de nos ressources, mais la filière GPL a montrée que ce souci lui était étranger.
Il y a quelques années, un grand constructeur automobile, associé à un grand groupe pétrolier, avait fait des tests dans plusieurs pays d'Europe (dont la France) avec des autos à moteur diesel modifiées pour fonctionner au GPL. Ce n'étaient pas des voitures converties par un petit installateur, c'était le constructeur lui-même qui faisait un essai. Nous avons pu parler avec une personne qui a eu l'une de ces autos en test, il nous a vanté la frugalité étonnante de ces prototypes. Et parce que la différence entre GPL et gazole est plus grande qu'entre essence et GPL, les avantages étaient bien réels. Le moteur diesel rejette moins de CO2 que son concurrent à essence, c'était encore 15 % (!!!) de moins pour le diesel au GPL. Les émissions d'hydrocarbures imbrûlés passaient à la limite du mesurable, et les autres émissions de polluants toxiques étaient aussi largement réduites. Mais parce que le marché était à créer, et que les perspectives de croissance étaient limitées, il fut décidé de ne pas mettre sur le marché ces voitures diesel alimentées au GPL.
Dommage pour tout le monde, la planète en premier. Pour la plus forte réduction de CO2, c'est le diesel qu'il faut convertir au GPL, et laisser les moteurs essence tels qu'ils sont, mais on ne le fait pas. Alors que Chevrolet vend toujours des voitures coréennes adaptées au GPL quand il est interdit à un particulier de posséder une voiture GPL en Corée du Sud, et que Subaru vend en France des autos au GPL qu'il se garde bien de vendre au Japon. Dacia a introduit une version GPL de sa Logan 1.4 litres sur le marché roumain, parce que là-bas comme ici, les pétroliers ont réussi à faire croire que le GPL méritait une grosse détaxe. Nous espérons qu'elle ne viendra pas nuire au développement de la filière biocarburants dans l'hexagone en restant hors de nos frontières, et qu'à mesure que le bilan CO2 global du GPL s'effondre, la fiscalité qui lui est applicable prendra le chemin inverse.
En attendant cela, aujourd'hui on va brûler du bois. En Birmanie, en Indonésie, au Laos, au Tajikistan, au Malawi, au Mozambique, au Zimbabwe, au Soudan, au Congo, en Zambie, en Tanzanie et ailleurs encore, ce midi, et chaque midi, et le soir aussi, des dizaines de millions de personnes vont brûler du bois pour manger chaud. Ils préfereraient avoir une cuisinière au gaz de ville. Mais il n'y a pas de réseau de distribution de gaz là où ils sont. Alors des plaques électriques, mais dans ces pays du tiers-monde, ils n'ont pas de centrales nucléaires ! L'électricité est un privilège. La seule énergie fiable, pratique et abordable est alors comme dans les campagnes françaises, la bouteille de butane. Mais il n'y en a pas pour tout le monde. Il y en aura d'autant moins pour les africains, que les européens subventionnent l'usage du GPL pour faire rouler leurs bagnoles. Les africains peuvent manger froid ou couper du bois. Le bois de cuisine n'est pas la première cause de déforestation, mais qu'importe, les partisans du GPL ne sont pas concernés. Ou sont-ils partisans des cuisinières à mazout pour les africains ?
Laurent J. Masson
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