Agir pour des infrastructures de recharge électrique
rapides et efficaces : convaincantes
Suite active de notre
essai des infrastructures de recharge pour véhicules électriques.
Notre constat fut alarmant. Les infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE) en France, en plus d'être dramatiquement insuffisantes, sont terriblement défaillantes. C'est très grave parce que ces équipements sont indispensables pour convaincre un automobiliste moyen, qui roule à l'essence ou au gazole, d'abandonner son auto pour un modèle électrique. La tâche est d'autant plus ardue que les automobilistes sont habitués à des prestations de haut niveau.
Les bornes de charge sont en concurrence avec les pompes à essence, et les pétroliers qui les possèdent ont une qualité : ils savent tenir un commerce. Quand un automobiliste se rend dans une station essence, il a la certitude raisonnable qu'il y aura de l'essence dans la cuve, que la pompe qui va amener cette essence au réservoir de sa voiture va fonctionner, et qu'il pourra payer avec le moyen de paiement le plus utilisé en Europe : une carte bancaire standard, et sans aucune formalité préalable, d'abonnement, d'inscription ou autre.
Ne sommes-nous pas en droit d'attendre des vendeurs d'énergie électrique qu'ils prodiguent la même qualité de service que leurs homologues pétroliers ? Ce serait la moindre des choses si on veut convaincre l'automobiliste lambda. Essayons-nous alors à la rédaction d'un cahier des charges non partisan, c'est à dire qui n'aurait pas été rédigé spécifiquement pour l'énergie électrique, mais qui partirait des méthodes et techniques appréciées des stations essence, et qui pourrait alors s'appliquer à n'importe quelle énergie.
Des bornes de charge pour séduire les automobilistes
1/ Débit de la pompe/Puissance de la borne
Toutes les pompes à essence n'ont pas le même âge, ni le même fabricant, mais il y a peu de différences de l'une à l'autre. Nous avons constaté un débit moyen autour des 18 litres à la minute. Du côté de l'électrique par contre, les différences sont énormes. Les plus lentes sont les bornes parisiennes, aussi bien les bornes de l'Autolib que celles de la mairie. Elles ne donnent qu'un courant de 230V 16A, soit 3,7 kW. A l'autre extrêmité, les bornes
superchargers de Tesla en Allemagne, envoient un courant de 135 kW. Soit 36 fois mieux ! Heureusement que la mairie de Paris ne gère pas de station d'essence, elle aurait des pompes qui ne débitent qu'un demi-litre à la minute !
C'est un drame que les partisans de la voiture électrique ne savent pas se faire respecter, avec des gens qui applaudissent à l'installation de n'importe quelle borne. Les IRVE seraient plus attractives s'il n'y avait que des bornes rapides. Rien d'autre, parce que ceux qui installent des bornes lentes sont
vendus au lobby du diesel, et qu'ils refusent l'idée qu'une voiture électrique puisse marcher aussi bien qu'une thermique. Ce n'est pas un hasard si celui qui installe les bornes les plus rapides du monde est l'américain Tesla. Parce qu'il ne demande aucune subvention, Tesla sait qu'il ne peut compter que sur les qualités intrinsèques de ses produits pour convaincre.
Que penser d'Elon Musk (le patron de Tesla Motors) qui a fait installer à ses frais 978 bornes de recharge dans l'hexagone ? Actuellement, ce n'est pas exactement ce qu'il a fait, puisque plus malin, il a concentré l'énergie nécessaire à 978 points de charge calibre Autolib/mairie de Paris dans 30, installés dans 15 stations de charge. Les automobilistes s'en réjouissent, il y a moins à attendre puisqu'on charge bien plus vite, et cela coûte moins cher, puisqu'on a réduit la surface nécessaire au stationnement. C'est
gagnant-gagnant une borne rapide, pour l'exploitant comme pour l'automobiliste. Enfin quand la technologie offre un éventail de 3,7 à 135 kW, c'est se moquer de l'automobiliste que de lui donner une borne de moins de 40 kW. Hors le domicile,
la recharge lente est une insulte, envers l'automobiliste comme le progrès, car nous croyons fermement qu'en 2020, il n'y aura plus une seule électrique sur le marché avec une batterie de moins de 50 kWh de capacité. Il ne sera plus possible de recharger sur une prise normale, ni sur une borne 230V 16A (sinon en laissant l'auto branchée plus de 20 heures).
2/ Maintenance et entretien de la borne/de la pompe
Les pétroliers sont très forts. S'il arrive qu'une pompe tombe en panne, elle est immédiatement identifiée comme une source de perte de revenus, et un agent vient la réparer sous les 24 heures. Même dans les stations où il n'y a aucun employé à demeure, les pétroliers ont mis en place des systèmes de télé-surveillance et de monitoring à distance, pour les prévenir de la moindre anomalie. On en est très, très loin sur le terrain des bornes de recharge, où un matériel peut rester en panne plusieurs semaines sans que personne ne s'alarme. De plus, les pompes à essence sont étalonnées, vérifiées à intervalle régulier, et on trouve sur chacune la date du dernier contrôle.
La même organisation autour des bornes de recharge n'est qu'une question de moyens. Pour créer la confiance, il faudrait même faire mieux avec, dans l'hypothèse d'une borne défaillante, l'affichage immédiat d'un message genre :
Borne Hors Service, Dépannage en cours. Est-ce compliqué de faire cela ? Les petits boulangers de quartier le font. S'ils doivent s'absenter un moment, ils ferment leur boutique en collant un petit papier,
De retour dans 10 minutes, sur la porte. Quand le serveur où est hébergé MoteurNature plante (!), les visiteurs voient un message d'erreur, et il y a un administrateur de permanence pour solutionner le problème dans le meilleur délai. Cela doit être aussi bien sur une borne de charge.
3/ Paiement et accessibilité
Dans beaucoup de supermarchés aujourd'hui, il est possible de payer avec une carte de crédit à partir de un euro d'achat. On trouve aux Etats-Unis, des parcmètres qui acceptent la carte de crédit, comme la plupart des cabines téléphoniques en Suisse. Du côté des pompes à essence, il y a aujourd'hui 2 systèmes. Soit il y a une caisse centrale qui offre un choix de moyen de paiement (espèces, carte de crédit, etc...), soit il y a un lecteur intégrée à la pompe. Il y a des milliers de pompe à essence en France qui sont dotées d'un lecteur de carte de crédit. Pour l'anecdote, on ajoutera l'exemple de l'Italie, où des milliers de pompes à essence automatiques prennent les billets de banques. On y met un billet de 20 €, on met le pistolet dans l'orifice de remplissage de son auto, et cela coupe automatiquement quand la somme payée est atteinte. Cela fonctionne 24h/24 et 7j/7, et en plus, sans qu'on le demande, cela donne un ticket avec la quantité de carburant délivrée, le montant de la TVA, la date et l'heure de la transaction. Quelle belle technologie ! Comment se fait-il que personne n'ait encore porté ces systèmes qui ont fait leurs preuves, et qui sont apprécié de tous, à une borne de charge ?
***
La lecture de nos reflexions donnera peut-être de l'urticaire aux fabricants de borne, et les quelques personnes qui se satisfont des infrastructures actuelles estimeront nos idées utopiques, parce que nous sommes plus ambitieux que l'un ou l'autre. L'objectif des IRVE ne doit pas être de répondre à la demande d'une minorité marginale, mais de satisfaire aux attentes, à toutes les attentes, de la majorité des automobilistes.
Notre sentiment est que beaucoup de gens qui installent des bornes de charge en France, ne le font pas pour répondre à un besoin. Ils agissent comme les petites filles qui se déguisent en sorcière pour Halloween. On met en place des bornes parce qu'il y a une sorte de pression sociale pour en mettre, et peu importe que ces bornes soient
pratiques, qu'elles servent peu ou beaucoup, voire même qu'elles fonctionnent...
Agir
Alors maintenant, que puis-je faire, moi ?
Mes lecteurs savent que je ne suis pas ministre, je leur confie aussi, que je n'ai pas 100 millions d'euros à la banque pour financer
des infrastructures nationales de recharge sur mes économies personnelles. Je peux néanmois agir en donnant de la confiance aux investisseurs avec ces mots :
je suis prêt à payer. Après avoir déploré les carences des IRVE, j'aurais bondi de joie si j'avais eu l'opportunité de payer pour une recharge rapide et qui marche, même au double du tarif EDF. Je donne des chiffres. A une borne de charge qui répond aux prescriptions données ci-dessus, je serais heureux de payer le kWh, 25 centimes. Et parce je suis écolo, si c'est de l'électricité produite de manière renouvelable (solaire ou éolien), je suis tout à fait d'accord pour payer 30 centimes le kWh. Si en plus la borne est très rapide, plus de 75 kW, parce que j'aime l'efficacité, je suis prêt à payer 35 centimes le kWh !
La BMW i3, la Kia Soul EV et la Tesla Model S acceptent déjà les recharges à plus de 75 kWh, et il y aura d'autres modèles avec la même faculté demain. Imaginons un plein de 40 kWh à 35 centimes, cela fait 14 €, et une auto comme la
Denza chinoise peut faire 250 km avec cela. Rouler 250 km en zéro émission avec de l'énergie renouvelable pour 14 €, qui osera dire que ce n'est pas un bon plan ? Les saoudiens peut-être, mais pour les automobilistes européens de l'Ouest, habitués depuis des décennies au matraquage fiscal, les vendeurs d'électricité ont une marge de manœuvre énorme pour augmenter leurs tarifs. Tout en maintenant le coût de la mobilité électrique en dessous de celui d'une voiture essence.
Vous pouvez agir, vous aussi !
Partagez cet article sur les médias sociaux avec les boutons ci-dessous, et partout où vous le pouvez, communiquez autour de l'idée que vous êtes prêts à payer le prix fort pour des bornes de charge efficaces, et boycottez les bornes lentes et gratuites. A défaut, la voiture électrique ne pourra jamais séduire la majorité des automobilistes, tandis que la mobilité électrique s'enfoncera plus encore dans l'impasse économique. Si en effet on regarde les subventions à l'achat d'une voiture électrique, les recettes des taxes sur les hydrocarbures, alors que les frais de la fermeture programmée des centrales nucléaires en fin de vie ne sont pas budgetés, on peut prévoir que le succès de la voiture électrique, s'il serait excellent pour l'environnement, serait une catastrophe pour les finances publiques. Et cela donne une raison de plus de se dépêcher de bâtir un système économique durable autour de la mobilité électrique. Alors, il faut payer. J'y suis prêt.
Laurent J. Masson
Nos illustrations, une des premières bornes de charge modernes de France, boulevard Victor, à la station BP, Paris 15 °. La recharge y est facturée au tarif forfaitaire de 5 €, sauf pour les voitures Nissan, pour lesquelles elle est offerte (ce constructeur a financé l'installation de cette borne).
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