Mercedes AMG Project One, la plus efficiente de toutes

J'étais au troisième rang. J'étais arrivé avec une demie-heure d'avance, mais la conférence de presse de Mercedes, au salon de Francfort, on sait que c'est la meilleure, alors il y avait foule. C'est connu que le salon de Francfort est la vitrine de l'industrie allemande, et le stand Mercedes, dans un hall totalement dédié à la marque, est toujours le plus impressionnant. Par sa taille, ses 2 étages et le nombre de voitures exposées, il surclasse tout ce qui existe partout ailleurs. Et puis cette année, il y avait une motivation supplémentaire, la promesse de la révélation d'une hypercar hybride hyper efficiente : l'AMG Project One.
Présentation façon boite de nuit, avec des rayons lumineux et musique techno, des immenses panneaux d'écrans s'ouvrent, et une voiture basse et large apparaît. La silhouette est impressionnante, mais étant assis je vois surtout la face avant qui donne un sentiment de déjà-vu. La voiture roule, elle se rapproche, mais quand la musique s'arrête, je m'étonne de n'entendre aucun bruit, jusqu'à ce que le conducteur donne plusieurs coups d'accélérateur rageurs. Oui, il y a de la rage dans ce bruit, mais aucune noblesse. C'est le bruit d'une mécanique stressée. Cela ressemble plus au bruit d'une tronçonneuse, ou d'un scooter 50 cm3 avec un passager à fond dans une côte, qu'à une supercar. On est loin, très loin du bruit musclé d'un V8 AMG, ou de l'excitation causé par le son d'un V12 italien. Alors certes, il n'y a qu'un V6 sous le capot, mais le vieux V6 d'une Dino 246 GT était autrement plus musical. Et bien plus abordable, idem le 6 cylindres 3 litres M54 des premières BMW Z4.

Mais c'est parce que la Mercedes AMG Project One est sur un autre segment. Il ne s'agit plus que de séduire les amateurs de belle mécanique, un objectif supplémentaire est de convaincre les partisans de l'efficacité énergétique, tout en montrant au monde le savoir-faire, la supériorité technologique du constructeur. C'est ce qu'avait déjà essayé BMW avec son i8, pour un succès très mitigé. La voiture se vend moins bien qu'attendu, et elle décote fort (on peut acheter 2 BMW i8 pour le prix d'une Mercedes SLS AMG). La fiabilité plus italienne qu'allemande n'aidant pas. C'est d'ailleurs un sujet d'interrogation pour cette Project One. Mercedes nous dit qu'elle reprend la technologie d'une Formule 1. Laquelle rappelons-le, ne fonctionne qu'avec une armée de mécaniciens hyper entraînés...
La technologie, c'est d'abord un moteur essence, un V6 1600, soit la même cylindrée qu'avait la Dacia Logan à son lancement. Un bloc repris à la monoplace de Lewis Hamilton, présent à Francfort, puisque c'était lui qui avait conduit l'auto sur le stand. Le régime maxi est de 11 000 tr/mn, soit une valeur jamais vue sur une voiture de série. Et un second miracle est qu'il soit parfaitement dépollué, puisqu'il répond à toutes les normes antipollution en vigueur, même aux Etats-Unis. Ceci est un véritable exploit qui doit imposer le recours à d'énormes catalyseurs. Dommage qu'ils n'étaient pas visibles.




On imagine bien sûr une suralimentation extrêmement performante, mais quand il y a de plus en plus de diesel double turbo, on est presque surpris de ne trouver ici qu'un turbocompresseur unique. Mais il a une arme secrète : un moteur électrique pour entraîner la turbine. Et pas un petit moteur de lave-glace, mais un moteur de 90 kW. Oui, le moteur qui sert à entraîner le turbo est plus puissant que le moteur d'une Peugeot 208 ! Mais avec cela, il n'y a aucun temps de réponse du turbocompresseur, et ce sont des quantités phénoménales d'air qui sont poussées vers les cylindres. La puissance est donc énorme, d'environ 670 ch, soit plus que celle du V12 double turbo de 6 litres d'une Mercedes S65 AMG. Et en plus, il y a derrière ce V6 essence, un moteur électrique de 120 kW, qui est directement relié au vilebrequin, en amont d'une boite de vitesses automatique à 8 rapports, et deux autres moteurs électriques de 120 kW, pour chacune des roues avants. Ces derniers méritent probablement d'entrer dans le livre des records, puisqu'alors qu'un très bon moteur électrique a régime maxi de 13/14 000 tr/mn, ceux-ci vont jusqu'à 50 000 tr/mn !!! C'est encore une fois du jamais vu. Quant aux batteries, elles sont les mêmes qu'en F1, donc avec une densité énergétique exceptionnelle, mais avec une capacité quadruplée pour autoriser 25 km d'autonomie en zéro émission. La Mercedes AMG cumule les superlatifs, et c'est aussi vrai pour son prix, d'un montant insensé de 2 275 000 €.
Mais sa caractéristique la plus intéressante est pourtant ailleurs, dans son rendement. On sait qu'un moteur essence n'a pas un rendement formidable (le rapport entre l'énergie contenue dans le carburant, et la force motrice). Il est de 30/35 % sur un moteur moderne. Les diesels, plus efficients, vont jusqu'à 40 %, tandis que le groupe propulseur le plus efficient au monde, est probablement le système hybride de la Toyota Prius, qui franchit de peu la barre des 40 %. La Mercedes AMG Project One serait nettement supérieure. Cela ne veut pas dire qu'elle consomme moins, mais que son rapport performances/consommation sera le meilleur de sa catégorie. A 350 km/h, aucune autre voiture ne consommera aussi peu. On rétorquera que ce n'est peut-être pas très utile, mais l'auto est aussi capable d'accélérer de 0 à 200 km/h en 6 secondes, et là, le conducteur de la Mercedes AMG pourra peut-être se réjouir qu'il n'a pas consommé plus qu'une Ferrari qui fait le même exercice en 12 secondes. C'est un vrai progrès.




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