Ford Mustang Mach E - Essai détaillé - Vous reprendrez bien un peu de rock'n roll ?
Ses points forts
Personnalité Rapport performances/consommation Autonomie Recharges en 150 kW |
Ses points faibles
Pas d'indicateur de puissance Toucher de la direction Pas de réglage isolé de la regénération |
Historique et présentation
S'il y a des bonnes et des mauvaises journées, ce matin où je devais essayer la Mustang Mach E, j'étais optimiste. J'ai vu la voiture arriver depuis ma chambre d'hôtel. Le convoyeur en sort pour prendre un sac dans le coffre, c'est un hayon. Cette Mustang est un crossover 4 portes ! Il y a quelques années, l'idée m'aurait horrifié, mais aujourd'hui mon enthousiasme ne faiblit pas. Bentley et Lamborghini font des SUVs, et ils établissent des records de vente, alors pourquoi pas une Mustang ? Il faut vivre avec son temps, et c'est valable aussi pour la propulsion. C'est écrit, la Mustang a établi sa réputation avec des moteurs V8, mais celle-ci est électrique. Une Mustang crossover électrique ! Comme avant tout nouvel essai, je me demande si cela va être une bonne auto, mais je me demande aussi si cette voiture est digne de porter son écusson de cheval au galop. Je me reposerai cette seconde question, après avoir répondu à la première.
Technologie
La Mach E est d'abord une voiture toute nouvelle, et il faut vraiment le souligner tant c'est rare. Rien n'est emprunté aux Mustang essence, ni à aucune autre Ford. Nous avons affaire à un châssis original, avec la batterie incorporée dans le plancher, sa capacité utile est au choix de 68 ou 88 kWh (75,7 et 98,7 kWh de capacité totale). L'autonomie WLTP varie de 440 à 610 km, ce qui paraît très bien. Pour la recharge, elle s'effectue au domicile avec une wallbox de 7,3 ou 11 kW (temps de recharge de 12 ou 8 heures avec la grosse batterie), et jusqu'à 150 kW sur les bornes rapides en courant continu. Jusqu'à 120 km d'autonomie gagnés en une dizaine de minutes, dans les meilleures conditions. A ce sujet, Ford est partenaire fondateur du réseau européen Ionity, où les clients auront droit à des recharges gratuites, la carte FordPass leur donnant par ailleurs accès à plus de 150000 autres bornes en Europe.
Pour la propulsion, il y a sur toutes les versions, une machine électrique accolée au pont arrière, et un second moteur est ajouté au train avant sur les versions à traction intégrale. La puissance varie de 198 à 258 kW (269 à 351 ch), elle atteindra même 487 ch sur la version GT qui sera lancée prochainement. Ma voiture d'essai est une traction intégrale de 351 ch avec la batterie de 88 kWh. C'est une auto de 4,71 m de long pour une largeur de 1,88 m. Des dimensions qui sont proches de celles des Mustang essence, les différences étant dans l'empattement bien plus long de 2,98 m (26 cm de plus que la Mustang essence, il a fallu cela pour loger la batterie), et bien sûr la hauteur, supérieure de 24 cm au coupé V8. C'est énorme, même si cette Mustang Mach E n'est qu'un crossover. Elle est plus basse qu'un SUV.
Intérieur et équipement
Les voitures n'ont plus de serrures depuis quelques années, mais cette Mach E va plus loin, elle n'a plus non plus de poignées de porte. A la place, il y a un bouton. Il me rappelle les boutons pression de mon blouson de ski. J'appuie sur ce bouton, et la voiture ayant reconnu le signal du transpondeur dans ma poche, la portière se déverrouille et s'entrouve de 3/4 cm, ce qui permet de saisir une pièce de plastique sur la tranche, et je peux ouvrir la porte. C'est mieux qu'une Tesla Model 3, sur laquelle je n'ai toujours pas trouvé comment ouvrir la porte sans me tordre les doigts, mais... Cela ne vaut pas une poignée traditionnelle. Il y a la même chose à l'arrière, j'aurais là aussi préféré une poignée normale, éventuellement intégrée au montant de vitre comme par exemple sur une Renault Zoé, ou de nombreux autres modèles.
Mais point positif, cette Mach E est la première Mustang dans laquelle je peux m'asseoir normalement à l'arrière. De la place pour les jambes, de la place pour la tête, oui, cette Mustang mérite l'appellation de familiale, même si la contenance du coffre n'est que moyenne à 402 litres (1420 litres en repliant la banquette arrière). Il est heureusement super pratique, avec le cache-bagages qui se lève très haut avec le hayon, et les dossiers des sièges arrières qui se replient bien à plat. On soulignera aussi le petit coffre de l'avant, d'une contenance de 81 litres (notre illustration le montre avec des cloisons qui le compartimente, mais elles sont amovibles). Pour le tableau de bord, l'inspiration Tesla est évidente, avec un méga écran central, et c'est mieux que sur les Model 3 & Y, puisqu'il y a aussi un joli écran rectangulaire juste en face du conducteur. La vitesse y est parfaitement visible, mais on regrette l'absence de la moindre indication de puissance. Quand tous les conducteurs de Mustang sont habitué à un compte-tours (sinon les propriétaires de Mustang 1964 à 1966 sans l'option
Rally-Pac), on ressent un manque.
L'écran central donne accès à beaucoup de fonctions, on voit par exemple que le régulateur de vitesse peut avoir un fonctionnement basique (roule à la vitesse fixée par le conducteur quoi qu'il arrive), ou adaptatif (la voiture ralentit si le capteur détecte que l'auto devant roule plus lentement), ou intelligent, c'est à dire avec lecture de la signalisation routière. Plus fort, il est possible de donner de la marge à ce mode intelligent. Si par exemple l'auto voit un panneau 90 km/h, on peut fixer une marge positive de 4 km/h, et l'auto roulera alors à 94 km/h, avant d'accélérer à 114 km/h si elle arrive sur une 4 voies avec une limitation à 110 km/h. La Mach E possède également un freinage automatique d'urgence, et le système de surveillance des angles morts peut déclencher un contre-braquage pour avertir le conducteur, et et décourager une manœuvre de changement de voie si une collision potentielle est détectée. Tout ceci est réglable comme le dispositif de stationnement automatisé, mais il faut prévoir un temps substantiel pour découvrir toutes ces fonctions, et les régler à ses goûts. On remarquera aussi que rien n'est figé, puisque la voiture est connectée, et qu'elle peut se mettre à jour toute seule (
over-the-air), en même temps qu'elle progressera toute seule, avec un petit système d'intelligence artificielle (
machine-learning) qui lui permettra d'apprendre les habitudes du conducteur.
Performances et tenue de route
Tout de suite, cela commence bien, je vois le capot. Le conducteur de voitures européennes, de Clio ou de Golf, n'y est pas habitué, mais dans une Mustang, on voit un large capot bien plat devant soi, et je n'ai qu'un mot pour le décrire : c'est super. J'apprécie aussi la hauteur de l'assise. On est un peu plus haut que dans une berline, mais pas trop. Déception ensuite, le feeling de la direction ne met pas du tout en confiance. Encore que ce soit seulement à toute petite vitesse. A allure routière, tout va bien, mais au démarrage, les premiers instants sont déconcertants, il faut s'habituer. Le levier de vitesse est une molette rotative, comme sur les Focus et d'autres Ford, une surprise est qu'en
Drive, il n'y ait pas besoin de garder son pied sur le frein pour que l'auto reste à l'arrêt. Ce n'est pas comme une américaine classique à boite automatique qui avance toute seule. Il y a 3 modes de fonctionnement,
Whisper,
Active et
Untamed, mais si la puissance de la regénération varie d'un mode à l'autre (ainsi que d'autres paramètres), je regrette l'absence d'un réglage séparé. On espère qu'il y en aura un, ainsi qu'un indicateur de puissance, sur la future version GT. Mais j'apprécie énormément l'affichage bien lisible, en %, du niveau de charge batterie. Toutes les électriques devraient avoir cela (elles ne l'ont pas).
Cette Mustang fait 351 ch, une valeur qui n'a sans doute pas été choisie au hasard, et qui rappellera des souvenirs à beaucoup, dont ma personne, puisque j'ai naguère conduit une Mustang dont le moteur était un
351-4V (cela désignait la cylindrée du moteur en pouce-cube, 5,7 litres, et l'alimentation par un carburateur 4 corps). La Mach E est confortable. Beaucoup de Mustang essence ont des suspensions sport, il faut comprendre fermes, voire carrément raides, mais tout va bien ici, la voiture est douce, on ne fera aucune réserve pour un usage familial. La motorisation électrique étant quasi silencieuse, Ford a cru bon de doter l'auto d'un bruiteur, qui retransmet le son d'un moteur V8 par les haut-parleurs, mais cela ne faire guère illusion. On l'arrête vite. Les accélérations heureusement, ne font pas semblants.
Ford annonce le 0 à 100 km/h en 5,1 secondes, mes impressions confirment ce très bon temps. C'est équivalent à une Jaguar I-Pace, et il n'y a aujourd'hui que la Porsche Taycan et les Tesla pour faire mieux (la future version GT les égalera !). Il semble y avoir de la puissance à toutes les vitesses, et même à 110 km/h sur l'autoroute, cela répond encore fort pour monter à 130 km/h, ou plus pour ceux qui iront passer leurs vacances en Allemagne. Attention cependant, un limiteur électronique arrête le jeu à 180 km/h. Côté comportement, la Mach E de base (propulsion, petite batterie) pèse déjà 1969 kg, et avec la grosse batterie et la traction intégrale par l'ajout d'un moteur avant, ma voiture d'essai faisait 2182 kg. Pour autant, la Mach E prend très peu de roulis, elle reste stable, avec une caisse parfaitement rigide, et les freins sont puissants. Est-elle agréable à conduire ? Si on oublie le flou de la direction à petite vitesse autour du point milieu, oui, tout à fait.
Consommation, efficacité énergétique
J'ai relevé une consommation de 16 kWh/100 km sur une route tranquille, il doit donc être possible de faire mieux que l'autonomie officielle WLTP de 540 km. Sur autoroute ensuite, j'aurais relevé 25 kWh/100 km, mais, la faute à plusieurs ralentissements imprévus, c'était en roulant un peu plus doucement que je n'en ai l'habitude lors de mes essais. Ce doit être un peu plus à la vitesse stabilisée de 133 km/h de nos tests habituels. Mais on peut tout de même signaler qu'en dépit de prestations substantiellement plus élevées, la Mach E ne semble pas consommer plus qu'une Volkswagen ID.4. Il faudra faire d'autres tests, mais avec sa grosse batterie de 88 kWh utiles, on voit déjà que la Ford ira plus loin. Il n'y a donc que les Tesla qui ont plus d'autonomie. Et encore, pas toutes. Enfin, trouvaille intéressante, l'ordinateur de bord détaille ma consommation, entre la part d'énergie utilisée pour la conduite, celle pour la climatisation (que j'avais mis au minimum), les accessoires (alors que je n'avais même pas allumé la radio), et la température (?). J'aurais été surpris de découvrir que 22 % de ma consommation d'énergie n'a pas servi au déplacement. Il y a sans doute là une piste d'amélioration, mais c'est peut-être moi qui ai faussé le calcul en faisant des arrêts photo sans couper le contact.
Conclusion
Le capot moteur large et plat, la face avant haute et aggressive, les feux arrières en 3 éléments. C'est certain que par rapport à une Hyundai Kona, une Nissan Leaf ou une VW ID.4, la Ford Mustang Mach E a quelque chose en plus. De la personnalité. Du charisme même. Il y avait 3 sortes de voitures électriques. Les Tesla, les premium chères (Audi e-tron, Jaguar I-Pace, Porsche Taycan), et puis les modèles grand public. La Mustang Mach E explose ces 3 catégories. Son tarif est juste au-dessus de ceux des électriques de grande série (premier prix à 48 990 €, et 65 500 € pour notre modèle d'essai bi-moteur et grosse batterie), avec des performances et une autonomie très proches des Tesla, et une personnalité dignes des meilleures allemandes bien plus chères. C'est une voiture qui fait avancer le schmilblick de l'électro-mobilité, et qui pourra convaincre certaines personnes de passer à l'électrique, ce qu'elles n'auraient pas fait si elle n'existait pas.
Reste la question de savoir si cette Mach E est une vraie Mustang ? Je peux répondre sans le moindre soupçon d'hésitation. A mes yeux, non. Je dois cependant préciser que mon avis n'est pas neutre, puisque j'ai conduit une Mustang pour la première fois, à... 14 ans. Une Mustang doit faire du bruit. Un gros bruit. Une Mustang doit avoir une suspension arrière rustique, pour que les pneus crissent au démarrage, et que la voiture se mette en travers, si on accélère fort quand la chaussée est mouillée. Cette Mach E est trop sophistiquée, pas assez brutale... Les Mustang 4 ou 6 cylindres, déjà, n'étaient pas de vraies Mustang, même si certaines versions avaient des performances honorables. Cette Mustang Mach E électrique est encore plus performante, et si elle a de nombreux clichés des Mustang, je n'imagine pas que Claude Lelouch l'aurait utilisée pour tourner
Un homme et une femme. Mais cela ne l'empêche pas d'être une voiture attachante. Autant qu'une Jaguar I-Pace ou une Porsche Taycan, et bien plus que n'importe quelle Tesla. La Mach E cartonne déjà en Norvège, je comprends pourquoi. Elle a du charisme, elle a la
rock'n roll attitude.
Laurent J. Masson
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